Édition du 16 avril 2024

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Europe

Portugal : une crise sociale et politique

La démission du Premier ministre socialiste, José Socrates, le 23 mars, a ouvert au Portugal une crise politique importante. À la tête d’un gouvernement minoritaire, le chef du PS est tombé face à un vote négatif du Parlement pour l’adoption d’un quatrième plan d’austérité. La gauche radicale – le Bloc de gauche et le PC Portugais – ont voté contre. Mais ce sont les partis de droite – le Parti social-démocrate en tête – qui avaient voté les précédents plans de rigueur, qui ont fait tomber le gouvernement en refusant de voter celui-ci.

La chute du gouvernement n’annonce pas la fin des mesures d’austérité très dures qui se sont abattues sur la population portugaise  : coupes dans les salaires, gel des pensions de retraites, privatisations, hausse des impôts à la consommation, coupes dans les services publics, etc. Le dernier plan d’austérité est temporairement repoussé mais la droite pourrait revenir aux affaires à la faveur de nouvelles élections qui pourraient avoir lieu en mai ou en juin, de manière autonome ou dans le cadre d’un gouvernement de grande coalition avec le PS. Dans tous les cas, les attaques contre les salariés et les jeunes risquent de pleuvoir dans un contexte où le Portugal subit de plein fouet une crise de la dette publique.

En effet, le gouvernement lui-même prévoit une récession d’au moins 1, 4 % du PIB pour l’année 2011, récession qui est largement la conséquence des mesures d’austérité, dont le PS au pouvoir est responsable. Face à cette situation, une offensive spéculative de grande ampleur rend extrêmement difficile le remboursement de la dette publique. Sur les marchés internationaux, les taux d’intérêts de la dette à deux ans ont augmenté jusqu’à atteindre 7, 7 % le 29 mars. En même temps, les agences de notation, en premier lieu Standard & Poor’s, accentuant leur pression sur le Portugal, ont dégradé à plusieurs reprises leur note sur la dette publique. Le Portugal risque donc probablement une intervention du FMI ou de l’Union européenne, comme en Grèce ou en Irlande, ce que le gouvernement Socrates n’a pas manqué d’utiliser pour justifier ses plans de rigueur.

Face à l’austérité, le Portugal a connu un cycle de mobilisations très important. Le 24 novembre a ainsi été une journée de grève générale massive et unitaire, appelée à la fois par la CGTP, proche du PCP, et l’UGT, proche du PS. Le 12 mars, une manifestation impressionnante a animé les rues des principales villes portugaises. Appelés par le collectif de précaires «  Génération fauchée  », ces cortèges contre la précarité ont rassemblé plus de 300 000 personnes dans le pays, faisant ainsi la plus grande mobilisation populaire depuis le 1er mai 1974, qui avait suivi la Révolution des œillets. Le 19 mars, une manifestation syndicale, appelée par la seule CGTP, a rassemblé contre l’austérité jusqu’à 100 000 participants à Lisbonne.

Au côté du mouvement social, il s’agit pour le Bloc de gauche de faire payer la crise à ses principaux responsables, en particulier les banques, de sortir de la crise en mettant en place un plan de création d’emplois dans les services publics, notamment la santé et l’éducation. Face à la dette, il faut mettre en œuvre une fiscalité inverse à celle qui existe actuellement, mettre en place des instruments européens pour aider les pays en difficulté à sortir de la crise.

Adrien Mazières-Vaysse

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