Édition du 23 avril 2024

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Québec

Pour que le réseau scolaire résiste à une deuxième vague de covid

Quelques jours avant la rentrée scolaire, le ministre de l’Éducation Jean-François Roberge ajustait son plan pour une rentrée sécuritaire permettant la réussite de toutes et tous en injectant 20 millions $ supplémentaires pour soutenir les élèves en difficulté. En réponse, un sondage mené auprès de 3800 enseignant.e.s « indiquait que près de sept enseignants sur dix ne faisaient pas confiance à ce plan. La moitié aurait préféré une présence alternée des élèves dans l’établissement. », favorisant ainsi l’application des mesures de distanciation sociale et le travail auprès des élèves.

Au même moment, les personnels de soutien sonnaient l’alarme concernant les pénuries de personnels dans les services de garde en milieu scolaire et du côté des concierges. De leur côté, les parents peinaient à s’y retrouver entre les annonces gouvernementales et la réalité dans leur école de quartier. Plusieurs souhaitaient l’accès tant à l’enseignement en ligne qu’à celui en classe.

La rentrée sur fond de pandémie s’est somme toute assez bien déroulée, la vie scolaire ayant repris son cours sous le mode de la distanciation. Toutefois, depuis quelques jours, les cas de covid répertoriés augmentent rapidement. Ainsi, les centres de services scolaires du Québec comptent 3100 établissements. On y comptait le 4 septembres 47 établissements scolaires où des cas avaient été déclarés. Le 8 septembre, on dénombrait 121 écoles touchées.

La rentrée scolaire s’avère à risque principalement dans la Capitale-Nationale, en Estrie, en Outaouais et à Laval. Les informations partielles transmises par la Santé publique et le ministère de l’Éducation ont incité un parent de Montréal à mettre sur pied sa propre recension sur le site Covid écoles Québec et au 9 septembre, ce sont 192 écoles infectées qui y étaient répertoriés.

Les défis à relever par les personnels qui travaillent dans les écoles sont nombreux. Ils doivent s’assurer d’être et demeurer en santé, protéger les élèves de possibles éclosions de covid dans leur établissement et bien sûr, enseigner. Les élèves infectés retirés des classes doivent être pris en charge par des équipe-école virtuelles.

Les contraintes auxquels les personnels des écoles sont soumis pèsent lourd et restreignent leur capacité à prendre leur envol et réaliser la scolarisation des élèves sous leur gouverne tels :

 la Loi sur la santé publique en vigueur jusqu’au 1er octobre suspend des droits qui leur sont reconnus dans leurs conventions collectives ;
 la conventions collective échue depuis avril 2020 n’est toujours pas renouvelée, les problématiques soulevées au cours des dernières années laissées en suspens ;
 le devoir de loyauté à l’employeur invite à une « omerta » plutôt qu’une dénonciation de situations insoutenables ;
 des pénuries de personnels dans tous les corps d’emploi font que des groupes-classe n’ont toujours pas d’enseignant.e attitré.e, que les services de garde ne peuvent répondre à la demande, que les mesures sanitaires sous la responsabilité des concierges peinent à être remplies ;
 des chantiers de rénovation d’urgence dans les écoles ont cours alors que les élèves sont en classe dû à l’incapacité de délocaliser les élèves par manque de locaux libres ;
 les mesures sanitaires qui visent à prévenir la propagation du coronavirus doivent s’adapter aux capacités locales de chaque établissement. Ainsi des enfants mangent tous ensemble dans le gymnase et non dans leur classe.
 les incohérences entre le passage des bulles classe non respectées dans les services de garde ou dans le transport scolaire ;
 le manque de locaux oblige à dépasser le nombre d’élèves dans des groupes classe ;
 les enseignantes enceintes maintenues en classe malgré les indications de la Santé publique et de leur médecin traitant.
 les ressources et soutiens techniques variables d’un établissement à l’autre, d’un centre de services scolaire à l’autre ;
 des activités sportives et artistiques interdites hors des groupes-classe puis autorisées à compter du 14 septembre ;

Plusieurs experts dont Égide Royer, conseiller spécial du ministre de l’Éducation se penchent sur la question allant jusqu’à dire aux enseignant.e.s de cibler les jeunes en difficultés à la rentrée pour éviter le décrochage scolaire. C’est pourtant au cœur des préoccupations des équipes écoles…

Toutefois, certaines remarques méritent que nous nous y attardions. Ainsi, pour plusieurs d’entre eux, c’est le comportement des adultes qui risque d’influencer le cours de l’épidémie au cours des prochaines semaines. « Ce n’est pas la rentrée le problème, ajoute la Dre Raynault, mais les éclosions actuelles dans les milieux de travail ou les gens qui font fi des règles dans les rassemblements privés. »

Il est vrai, tel que l’avançait Normand Baillargeon dans sa chronique du 6 septembre dernier, que toutes ces contraintes et inquiétudes donnent le vertige. Tel qu’il le suggère « Exigeons … qu’on s’efforce de réunir toutes les informations disponibles, qu’on s’abreuve à toutes les données probantes pertinentes et demandons qu’on s’ajuste, le plus rapidement possible. »

Pour que toutes les informations et données soient colligées, les équipes-école doivent développer une approche collégiale des problèmes rencontrés, tel que l’indiquait en juin dernier Alex Pelchat, enseignant à Montréal. Une connaissance terrain, un soutien entre les divers personnels, des demandes précises pour résoudre un problème rencontré sont des avenues souhaitées en juin dernier par des intervenant.e.s de l’éducation. Les parents doivent être mis dans le coup pour qu’ils contribuent à maintenir la cohésion entre l’équipe-école et les jeunes.

Cette approche d’auto-organisation est l’occasion de solidarités nouvelles, inter-organisations syndicales là où se fait l’école. Bien sûr, les syndicats ont leur place dans cette aventure. Ils peuvent contribuer au réseautage des différents personnels et faire connaître ce qui se vit localement et permettre qu’une résonance régionale, voire provinciale se développe. Toutefois, l’autonomie des équipes-école doit être à la base des réponses à trouver.

Un tel exercice a été mis en place au pire de la crise dans les CHSLD de Laval. Des intervenant.es. de la base ont pris à bras le corps de modifier des pratiques qui mettaient en danger la santé des résidents et des travailleuses et des travailleurs. Elles savaient ce qu’elles avaient à faire, elles étaient formées pour cela. Des solutions ont été trouvées sur place, par les personnels qui ont trouvé réponse à la mauvaise gestion qui avait cours sur le terrain. Il en va de même dans les écoles.

Un parcours de combattant.e.s s’annonce en cette rentrée scolaire. Les vaillantes équipes-écoles sont à s’organiser pour à la fois résister à la pandémie et scolariser les jeunes dans leurs classes.

Vivement un écho du terrain pour nous solidariser avec elles !

9 septembre 2020

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