14 novembre 2024 | tiré du site Entre les lignes entre les mots
La réponse ne se trouve pas forcément dans la décroissance, même marxiste (pour Kohei Saito, voir ses interviews dans Le Monde et Alter Eco) qui serait le communisme d’aujourd’hui mais, pour le capitalisme, la construction de nouveaux paradigmes remettant totalement en cause les formes de l’accumulation existantes jusque là. Cette révolution dépasse la naissance d’un nouveau régime d’accumulation qui prendrait la place de celui qui se maintient et qui a pris son envol depuis le milieu des années 1980, dit régime d’accumulation à dominante financière. Il s’est traduit par la déréglementation dans tous les domaines à commencer bien sur par la finance avec comme effet la croissance exponentielle des marchés financiers et le droit du travail pour laisser la place à une hypermondialisation réduisant la part des Etats, avec comme conséquence une crise politique profonde passant par la contestation de la légitimité des gouvernements tout autant que des « élites » et les institutions y compris la science – voir les théories du complot et les anti-vaccin). Les politiques économiques se référant à un corpus commun appelé le néo libéralisme.
Cette idéologie est en train d’exploser et d’imploser. Les inégalités, dans toutes les sociétés, se sont approfondies, la pauvreté s’est élargie même si l’extrême pauvreté a reculé. La génération d’aujourd’hui vit moins bien que la génération d’avant. Les reculs de la protection sociale, la hausse de la précarité provoquent un sentiment de colère individuelle qui, dans les divisions profondes entre groupes sociaux, se manifeste par une sorte d’apathie-révoltes individuelles – un oxymore qui reflète mieux la situation que le terme de « déclassement » – qui peuvent s’agglutiner sans la référence à un projet de société commun, collectif comme l’a montré la révolte des « gilets jaunes » en France ou celle du monde agricole.
Ces politiques ont échoué y compris dans la réalisation d’une croissance économique qui aurait pu dissimuler la profondeur des inégalités. La récession fait la démonstration de l’incapacité de ces politiques. La limite de ce régime d’accumulation est, sur le terrain économique, évidente.
La pandémie a montré d’une part les limites de l’hypermondialisation. La déstructuration des chaînes de valeur a suscité une nouvelle mondialisation en même temps que la nécessité de lutter contre la crise politique. La doxa dite néo libérale était condamnée.
Depuis la pandémie, le discours a changé. Il est question de « nationalisme », de se « défendre » face à tous les autres, de faire la guerre non pas pour faire la paix mais parce que la guerre sert à construire un sentiment d’appartenance. Les montées de l’extrême droite exprime cette nouvelle donne que l’élection de Trump couronne. Kamala Harris a conservé le vieux discours, la vieille idéologie. Trump, avec ses outrances, a signé la fin de cette idéologie.
Désormais la référence sera, selon toute vraisemblance, libertarienne à l’image de Millei en Argentine. La démocratie actuelle n’est plus légitime de la faute même de ces politiques. Répression et absence totale de règle dans un cadre national avec la montée d’un protectionnisme douanier pour défendre les capitalistes nationaux seront les nouveaux credo. Un éclatement social plus important qu’aujourd’hui, une contre révolution pour conserver la place des plus riches comme fractions dominantes de la société.
Les sociétés capitalistes ont atteint leurs limites, climatiques, économiques – depuis la grande crise de 2007-2008, l’accumulation est très faible -, sociale, politique… La finance dominante privilégie la distribution de dividendes pour que les riches deviennent encore plus riches. Depuis les années 2000 en gros, les grandes fortunes sont financières et dépendent du cours de la Bourse.
Cette caste qui pratique l’entre soi et n’est ouverte sur aucun des grands problèmes qui agitent les sociétés, de ces révolutions qui transforment notre monde et qui devraient le détruire, de cette décomposition à l’œuvre, s’enferment dans la défense de leurs privilèges. La contre révolution est préalable pour que les réponses nécessaire aux crises fondamentales vécues par le capitalisme ne soient pas posées. Musk avec Trump s’attaquera aux fonctions publiques pour privatiser toujours plus et utilisera les évangélistes aux États-Unis et en France Bolloré allie la défense de la finance et le catholicisme intégriste contre toute possibilité de révolution même interne au capitalisme.
Faute de projet, disons « socialiste », la contre révolution s’étendra liée à une nouvelle forme du fascisme. La guerre fait partie intégrante de cette panoplie.
Nicolas Béniès
En complément possible :
Bill Fletcher Jr : Comment se défendre dans la nouvelle période Trump
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/11/10/comment-se-defendre-dans-la-nouvelle-periode-trump/
Jessica Washington : Les électeurs et les électrices ont massivement choisi de protéger l’avortement – même lorsqu’elles et ils n’ont pas choisi Harris
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/11/08/les-electeurs-et-les-electrices-ont-massivement-choisi-de-proteger-lavortement-meme-lorsquelles-et-ils-nont-pas-choisi-harris/
Face à crise du (dés)ordre géopolitique international, « je me concentrerai dans cet article sur une description sommaire de la situation actuelle, pour ensuite caractériser les différentes positions qui émergent au sein de la gauche dans cette nouvelle phase et insister sur la nécessité de construire une gauche internationaliste, opposée à tous les impérialismes (principaux ou secondaires) et solidaire des luttes des peuples agressés. »
Tiré de Europe Solidaire Sans Frontières
15 novembre 2024
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