Édition du 16 décembre 2025

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Afrique

Sionisme chrétien dans le Sud global : le cas de l’Afrique du Sud

Au cours de leur conquête des terres africaines au XIXᵉ siècle, les empires européens utilisèrent les missions chrétiennes pour asseoir leur légitimité à s’approprier les ressources et imposer leur domination culturelle. Les écoles missionnaires et les églises diffusaient les valeurs occidentales, sapant les traditions africaines et présentant le service rendu à l’empire comme un service rendu à Dieu.

Tiré d’Afrique en lutte.

Dans ce vaste contexte impérial, les évangélistes britanniques commencèrent à envisager un projet politique de réinstallation des Juifs en Palestine. Les appels théologiques à la « restauration » juive circulaient en Europe depuis des siècles ; mais c’est Lord Shaftesbury, principal représentant du sionisme chrétien dans l’Angleterre victorienne, qui fit pression sur le ministre des Affaires étrangères, Lord Palmerston, afin qu’il soutienne la réinstallation juive dans le but de renforcer l’influence britannique face aux ambitions concurrentes de la France et de la Russie.

Les évangélistes contribuèrent ainsi à transformer une croyance théologique en idéologie politique alignée sur les intérêts impériaux.¹

Ancré dans la conviction qu’un État juif en Palestine conditionne le retour de Jésus et l’avènement de la fin des temps, le sionisme chrétien contemporain assimile souvent l’État d’Israël moderne au royaume biblique et présente sa politique comme relevant de la volonté divine, faisant ainsi de la présence palestinienne un obstacle au dessein divin. Dans cette perspective, le déplacement forcé des Palestinien·nes est non seulement justifié, mais considéré comme une obligation religieuse.

Ce projet politique examine la diffusion du sionisme chrétien pro-israélien dans le Sud global en se concentrant sur l’Afrique du Sud, bastion historique de la solidarité avec la Palestine. Il expose les moyens mis en œuvre par le régime israélien pour saper ce soutien et affaiblir la solidarité avec les Palestinien·nes, en instrumentalisant le sionisme chrétien pour soutenir la cause de l’État colonialiste.

Le sionisme chrétien dans le Sud global

Les résistances à la normalisation des relations avec Israël dans le Sud global s’enracinent dans la solidarité anticoloniale et le soutien à l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) ; or le régime israélien s’efforce depuis longtemps de vaincre ces résistances. L’un des points d’entrée les plus efficaces d’Israël a été l’influence croissante du sionisme chrétien, qui s’est développée parallèlement aux mouvements pentecôtistes et au dispensationalisme prémillénariste en Afrique et en Amérique latine au cours des trois dernières décennies. Les décideurs israéliens ont formalisé cette approche en 2004 en créant à la Knesset le Christian Allies Caucus, qui a pour mission de « mettre en place des canaux directs de communication, de coopération et de coordination » avec des dirigeants chrétiens du monde entier.

Les changements observés lors de la Fête des Tabernacles, un rassemblement évangélique annuel organisé à Jérusalem depuis 1980 pour soutenir Israël, témoignent d’une popularité croissante du sionisme chrétien à l’extérieur du Nord global. En effet, lors de la première édition, les Américains représentaient environ la moitié des 3 000 participant·es. Mais en 2008, le Brésil a envoyé la plus grande délégation, comptant entre 1 300 et 1 500 participant·es. Forte d’un soutien chrétien croissant envers Israël dans le Sud global, l’Ambassade chrétienne internationale de Jérusalem (International Christian Embassy Jerusalem, ICEJ), l’une des institutions sionistes chrétiennes les plus influentes au monde, a ouvert un bureau à Rio de Janeiro en 2023.

En Afrique du Sud, l’influence grandissante du sionisme chrétien est étroitement liée à la diffusion rapide de courants théologiques en phase avec ses croyances fondamentales. Les pentecôtistes, par exemple, qui ne représentaient que 0,2 % des chrétiens sud-africains en 1950, comptent aujourd’hui environ 10 % d’entre eux. Les enquêtes montrent que le soutien à Israël est en moyenne deux fois plus élevé au sein des communautés pentecôtistes que dans les autres groupes chrétiens. Bien qu’ils ne soient pas uniformément pro-israéliens, les pentecôtistes ont tendance à interpréter les prophéties bibliques de manière littérale, ce qui les rend plus réceptifs à l’idée que l’État israélien moderne accomplit les Écritures. Cette orientation rapproche souvent les communautés pentecôtistes des récits du sionisme chrétien et favorise un soutien à Israël plus actif que dans les autres confessions.

La montée du sionisme chrétien en Afrique du Sud a des conséquences importantes sur le mouvement de solidarité avec la Palestine. Les Palestinien·nes et les Sud-Africain·es noir·es partagent une longue histoire de lutte commune contre le colonialisme et l’apartheid, fondée sur un soutien réciproque à la libération de chacun. L’OLP entretient depuis des décennies des liens étroits avec le Congrès national africain (ANC), en formant par exemple les combattants sud-africains de la liberté durant la lutte contre l’apartheid. Cette solidarité entre Noir·es et Palestinien·nes contraste fortement avec le soutien historique d’Israël au régime d’apartheid suprémaciste blanc, basé sur une assistance militaire et la volonté de réprimer le mouvement de libération sud-africain et les luttes anticoloniales à travers le continent.

L’Afrique du Sud est devenue un centre essentiel de soutien à la libération palestinienne, comme en témoigne récemment son recours devant la Cour internationale de justice (CIJ), accusant Israël de génocide. En réponse, le régime israélien a intensifié ses efforts de diplomatie publique et d’ingérence en Afrique du Sud, cherchant à affaiblir cette solidarité. Si le sionisme chrétien et la mobilisation pro-israélienne parviennent à s’imposer en Afrique du Sud, centre majeur de solidarité avec la Palestine, les implications pour l’ensemble du Sud global seront considérables.

Groupes pro-Israël : la matrice sud-africaine

Il n’existe pas de définition ou de forme universellement reconnue du sionisme chrétien, et le soutien au régime israélien prend des formes très diverses — allant de prières ponctuelles durant la messe à un soutien financier aux colons qui s’emparent de terres et de maisons palestiniennes. En Afrique du Sud, le sionisme chrétien peut être défini par deux grands courants : un lobby pro-Israël actif et un courant dévotionnel plus « passif », composé de congrégations et d’individus qui adoptent une théologie valorisant l’État israélien sans toutefois militer activement en sa faveur.

Les groupes sionistes chrétiens actifs expriment leurs convictions par un soutien direct au régime israélien et à ses objectifs géopolitiques. Bien que ces groupes s’impliquent dans diverses initiatives politiques, le sionisme demeure un élément central de leur théologie et de leurs revendications. Ils entretiennent de fait des liens étroits avec des réseaux israéliens et sionistes qui cherchent à renforcer le soutien au régime, tant au niveau local qu’international.

L’ICEJ et Bridges for Peace (BP) comptent parmi les groupes sionistes chrétiens les plus influents d’Afrique du Sud. En tant que branches de mouvements mondiaux dédiés au « soutien à Israël », ils disposent de bureaux à travers le monde et collaborent étroitement avec les South African Friends of Israel (SAFI), qui travaillent directement avec le ministère israélien des Affaires stratégiques, en particulier pour contrer le mouvement Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS). Bien que l’ICEJ et BP soient principalement implantés dans les communautés blanches sud-africaines, SAFI a développé de solides liens avec des congrégations noires, contribuant à diffuser la théologie pro-israélienne dans tous les groupes raciaux.

En outre, l’African Christian Democratic Party (ACDP), parti explicitement chrétien représenté au parlement sud-africain, s’est engagé dans son manifeste de 2024 à « rétablir des relations diplomatiques complètes avec Israël » et à transférer l’ambassade sud-africaine à Jérusalem. Son fondateur, Kenneth Meshoe, est également membre de la Israel Allies Foundation, un réseau mondial qui promeut des lois pro-israéliennes dans plus de 40 parlements nationaux, y compris en Afrique du Sud.

Les groupes sionistes chrétiens d’Afrique du Sud et les réseaux en faveur d’Israël sont étroitement liés, leurs dirigeants passant souvent d’une organisation à l’autre pour favoriser les programmes pro-israéliens. Meshoe, par exemple, a également créé une initiative destinée à contrer les campagnes BDS, appelée Defend Embrace Invest Support Israel. Malcolm Hedding, un théologien sud-africain de premier plan, a dirigé Christian Action for Israel (South Africa) avant de s’installer à Jérusalem pour devenir directeur exécutif de l’ICEJ. Cassandra Mayekiso a cofondé l’Africa for Israel Christian Coalition, a ensuite travaillé avec les South African Friends of Israel, et dirige aujourd’hui la branche sud-africaine de StandWithUs. En tirant parti de ce chevauchement entre les dirigeants des groupes sionistes chrétiens et des organisations de défense pro-Israël, le ministère israélien des Affaires stratégiques fait souvent transiter ses activités par des organisations locales afin d’éviter l’apparence d’une ingérence étrangère.

En l’absence d’audits financiers des groupes sionistes pro-israéliens, leurs sources de financement demeurent opaques, bien que certains indices suggèrent l’existence d’un soutien du gouvernement israélien. Par exemple, Proclaiming Justice to the Nations, une organisation sioniste chrétienne américaine classée comme groupe haineux anti-musulman, a reçu un financement direct du régime israélien pour organiser des événements à Johannesburg et au Cap avec des partenaires locaux tels que la South African Zionist Federation et l’ICEJ. Cette information a été révélée uniquement après une demande faite dans le cadre de la loi sur la liberté d’information, qui a mis au jour des paiements approuvés par le ministère israélien des Affaires stratégiques à des groupes du monde entier. L’organisation en question continue de démentir la réception de ces fonds.

Ce réseau de groupes sionistes pro-israéliens constitue un ensemble de lobbying coordonné, dans lequel les dirigeants circulent aisément entre des rôles locaux et internationaux, en harmonisant leurs messages et leurs actions de mobilisation dans le monde entier. Il en résulte que l’organisation sioniste chrétienne en Afrique du Sud est étroitement liée à l’infrastructure plus large de la sensibilisation sioniste internationale.

Au-delà de ce lobby structuré, le sionisme chrétien prospère également dans les congrégations de l’Évangile de la Prospérité, où le soutien à Israël est présenté comme une obligation spirituelle associée à la faveur divine, à la santé, à la richesse et au succès. Ces interprétations théologiques amènent de nombreux sionistes chrétiens — en particulier au sein de communautés marginalisées — à s’aligner automatiquement sur Israël en assimilant les Israélites bibliques à l’État moderne et en décrivant le régime sioniste contemporain comme « la nation de Dieu ». Ces idées circulent largement dans les églises et à travers de grands réseaux médiatiques chrétiens, qui touchent un vaste public et promeuvent explicitement des messages sionistes. Les voyages de pèlerinage vers la Palestine occupée et les initiatives de dialogue inter-religieux destinées à apaiser le conflit israélo-palestinien renforcent encore cette vision du monde, contribuant à la diffusion rapide du sionisme chrétien au sein des communautés Pentecôtistes et Charismatiques du Sud global.

En Afrique du Sud, ce large courant de pratiques religieuses, beaucoup moins actif que les réseaux de lobbying formels, constitue la majorité des sionistes chrétiens et joue un rôle essentiel dans le maintien d’un sentiment pro-israélien. Son principal impact ne réside pas tant dans une mobilisation ouverte en faveur d’Israël, que dans une incitation à se désolidariser des Palestinien·nes, et à imposer le silence concernant les droits palestiniens. Ensemble, les courants religieux sud-africains et le réseau de lobbying constituent une base sioniste durable, étendant leur influence des églises jusqu’au parlement.

Impact politique d’une base sioniste

L’ANC, le principal parti au pouvoir en Afrique du Sud, perd progressivement sa majorité parlementaire. Ce déclin annonce une dépendance croissante envers la politique de coalition, dans laquelle des petits partis peuvent exercer une influence disproportionnée. À mesure que la domination de l’ANC s’affaiblit, les groupes pro-israéliens au sein de ces petits partis gagnent en influence.

Les partis pro-israéliens d’Afrique du Sud, notamment la Patriotic Alliance, le Freedom Front Plus et l’African Christian Democratic Party, disposent respectivement de neuf, six et trois sièges parlementaires. Pris isolément, leur influence demeure limitée par rapport à l’ANC ou à l’Alliance démocratique. Pourtant, lors de négociations de coalition ou sur des projets de loi controversés, leurs voix peuvent s’avérer décisives, leur donnant la possibilité d’obtenir des concessions en échange de leur soutien.

Cependant, même des partis apparemment « neutres », tels que l’Inkatha Freedom Party, qui détient 17 sièges, peuvent entraver des législations pro-palestiniennes en réduisant la marge de manœuvre politique de l’ANC au parlement. Ces partis n’ont pas nécessairement besoin de s’opposer directement à ces textes : le simple fait de ne pas les soutenir peut affaiblir la position de l’ANC.

Dans un paysage politique de l’Afrique du Sud fragmenté, la montée d’un bloc électoral sioniste chrétien renforce de petits partis pro-Israël et intensifie les efforts de lobbying qui remettent en cause la solidarité de longue date du pays avec la Palestine. L’évêque Lekganyane de l’Église chrétienne sioniste a participé à une tournée de propagande en Palestine colonisée sous couvert de « mission de paix » et a ensuite fait appel directement au président sud-africain Cyril Ramaphosa pour que l’ANC adopte une position plus souple à l’égard d’Israël. Inkosi Shembe, chef de l’Église baptiste de Nazareth d’Afrique du Sud, s’est quant à lui rendu à Jérusalem pendant le génocide commis par Israël pour exprimer sa solidarité avec le régime colonial, déclarant : « Notre tâche consiste à manifester notre soutien de manière concrète, pour bien montrer que le gouvernement ne soutient pas la voix du peuple. » D’autres dirigeants religieux ont entrepris des visites similaires, souvent financées par le régime israélien et ses intermédiaires en Afrique du Sud. Ironiquement, ces tournées de propagande soigneusement orchestrées reproduisent les mêmes tactiques autrefois déployées par l’Afrique du Sud de l’apartheid dans sa tentative vaine de réhabiliter son image internationale.

Contester le sionisme chrétien

La longue histoire de la solidarité entre Noir·es et Palestinien·nes, remise à l’ordre du jour par le génocide en cours perpétré par Israël à Gaza, a revitalisé les réseaux anticoloniaux en Afrique et en Palestine après des années de relatif délaissement. L’Afrique du Sud ne fait pas exception : l’opposition au sionisme chrétien est devenu un autre front dans la lutte plus large pour la libération palestinienne.

Le Conseil sud-africain des Églises (SACC) a joué un rôle central dans ce combat en organisant des ateliers et des conférences de soutien à la Palestine tout en remettant en cause le sionisme chrétien et l’évangile de prospérité. Le travail du SACC dépasse la politique intérieure : il fait avancer les revendications palestiniennes au sein du Conseil œcuménique des Églises grâce au Document Kairos Palestine. Publié en 2009 à Bethléem par des théologiens chrétiens palestiniens, ce document appelle les chrétiens du monde entier à soutenir les Palestinien·nes dans leur résistance à l’occupation. Il fait écho au Document Kairos de 1985, publié par des théologiens d’Afrique du Sud, qui appelait les chrétien·nes du monde entier à aider les Sud-Africain·es à s’opposer à l’apartheid.

Parallèlement, l’Église anglicane d’Afrique australe a fermement condamné l’apartheid israélien. Lors de sa réunion de juin 2025 à Johannesburg, le Comité central du Conseil œcuménique des Églises a publié une déclaration qui non seulement affirmait les droits des Palestinien·nes et condamnait l’apartheid israélien, mais appelait également à des sanctions ciblées, au désinvestissement et à un embargo sur les armes contre Israël pour violations du droit international.

Pour autant, de nombreuses Églises évitent encore de s’opposer franchement aux formes passives de sionisme enracinées dans leurs propres traditions, souvent maintenues par l’inefficacité des enseignements du passé. Malgré cela, un engagement significatif reste possible. Mettre en lumière les préjudices directs que les doctrines sionistes chrétiennes infligent aux Palestinien·nes peut pousser les congrégations à reconsidérer leur position. Ncamisile Pamela Ngubane, autrefois une militante sioniste chrétienne de premier plan, a incarné ce changement en démissionnant de son poste de porte-parole de SAFI après avoir découvert la réalité de l’assujetissement palestinien.

Pour contenir la menace qui pèse sur le mouvement de solidarité avec la Palestine, la Fondation Mandela a lancé un appel à propositions pour ses Solidarity in Action Awards, avec un accent particulier sur la contestation du sionisme chrétien en Afrique du Sud. Comme le souligne la fondation, « l’interprétation détournée des Écritures religieuses pour justifier la domination et la discrimination est quelque chose que nous ne connaissons que trop bien en Afrique du Sud ». Cette déclaration établit un lien évident entre la manière dont la religion a autrefois été utilisée pour légitimer l’apartheid en Afrique du Sud et la manière dont des arguments théologiques similaires sont aujourd’hui mobilisés pour défendre le régime israélien.

En fin de compte, la lutte contre le sionisme chrétien ne peut pas reposer uniquement sur le débat théologique. Contester cette idéologie exige également de dévoiler les conséquences matérielles qu’elle dissimule, à savoir le rôle de longue date d’Israël en tant que puissance de domination à travers le Sud global. Pendant des décennies, Israël s’est aligné sur des régimes autoritaires et coloniaux de peuplement, agissant contre les communautés noires et autochtones par le biais de son soutien militaire et de ses partenariats politiques. Ce bilan inclut son appui à l’Afrique du Sud de l’apartheid, sa complicité dans le génocide au Guatemala et la fourniture d’armes et de formations à la dictature militaire brésilienne.

Conclusion

La montée du sionisme chrétien en Afrique du Sud — alimentée par une théologie littéraliste, une coordination internationale et l’opportunisme politique — représente un défi croissant pour le soutien de longue date du pays à la lutte de libération palestinienne. Par des moyens tant actifs que passifs, le sionisme chrétien s’est enraciné dans certaines parties de la société sud-africaine, en particulier au sein des courants pentecôtistes et théologiques prônant l’évangile de prospérité. Ce soutien religieux, souvent présenté comme des initiatives apolitiques fondées sur la foi, sert en réalité les objectifs géopolitiques du régime israélien en consolidant une base fidèle, déconnectée des réalités du colonialisme sioniste. À mesure que ces croyances influencent la politique, notamment dans une ère fondée sur les coalitions gouvernementales, l’affaiblissement de la position officielle de l’Afrique du Sud sur la Palestine représente un risque de plus en plus prégnant.

Pour les Palestinien·nes, l’influence croissante du sionisme chrétien en Afrique du Sud et dans l’ensemble du Sud global souligne l’urgence qu’il y a à œuvrer pour le renforcement des relations et la reconstruction stratégique d’anciennes alliances. Au lieu de laisser les récits sionistes dominer, les militant·es doivent s’employer à démystifier la réalité du sionisme chrétien, contester ses justifications et révéler ses liens avec les régimes coloniaux et d’apartheid, passés comme présents. Construire une solidarité authentique et sensibiliser les communautés africaines à l’oppression palestinienne, tout en établissant des parallèles clairs avec leurs propres histoires de résistance, peut aider à reconquérir ces espaces. La lutte contre le sionisme chrétien dans le Sud global dépasse le cadre théologique : c’est un combat contre des intérêts coloniaux matériels. Elle exige une approche renouvelée, populaire, fondée sur des histoires partagées de résistance à l’impérialisme.

Recommandations

Contester le sionisme chrétien comme vecteur d’influence israélienne en Afrique et au-delà exige des stratégies coordonnées entre mouvements, espaces politiques et communautés religieuses pour dévoiler son rôle dans l’expansionnisme et la domination néocoloniale. Les recommandations suivantes présentent des actions concrètes pour les militant·es, défenseur·es des droits et responsables religieux afin de renforcer la solidarité, contrer la désinformation et consolider la résistance mondiale.

Militant·es, groupes de jeunes et mouvements de solidarité :

 Représenter la Palestine comme partie prenante de la décolonisation inachevée du Sud global, en la reliant directement à la lutte anti-apartheid en Afrique du Sud.

 Démontrer que le sionisme chrétien sert des intérêts néocoloniaux et mettre en lumière le rôle d’Israël dans la répression mondiale à travers les armes, les logiciels espions et la formation autoritaire.

 Faire appel à des militants vétérans de l’anti-apartheid et à des théologiens pour renforcer la solidarité historique.

 Construire des alliances entre le mouvement BDS, les jeunes et les mouvements populaires afin de contrer les récits sionistes et de relier la libération palestinienne aux luttes africaines contre le néocolonialisme et le capitalisme.

 Développer des outils numériques, des ateliers et des programmes culturels pour démystifier le sionisme chrétien et mobiliser les jeunes.

 Coordonner des campagnes et des actions directes ciblant les entreprises complices des crimes israéliens et s’opposant au transfert de ressources comme le charbon.

Défenseur·es politiques, journalistes et organismes de surveillance :

 Enquêter sur et dénoncer les réseaux sionistes chrétiens, leurs sources de financement et leurs liens avec le gouvernement israélien ainsi que son appareil de propagande.

 Plaider pour une surveillance des ONG et des associations caritatives complices de violations des droits ; révoquer leur statut d’association caritative lorsque cela est possible.

 Combler les vides juridiques permettant le financement d’activités illégales israéliennes et accroître la transparence dans les rapports fiscaux des organisations exonérées d’impôts.

Responsables religieux et théologiens :

 Promouvoir la théologie de la libération comme alternative au sionisme chrétien et engager les Églises dans la solidarité populaire.

 Amplifier les voix des théologiens palestiniens et favoriser des alliances mondiales avec les Églises qui résistent aux théologies impérialistes.

 Utiliser les forums internationaux (par exemple, le Conseil œcuménique des Églises) pour faire entendre les perspectives palestiniennes.

 Étendre l’initiative Kairos Palestine en une coalition internationale unissant les mouvements de libération du Sud global.

 Approfondir la collaboration stratégique avec Kairos Afrique du Sud pour un plaidoyer théologique et politique conjoint.

1- Curtin, P.D. (1971). The “Civilizing Mission”. In : Curtin, P.D. (eds) Imperialism. The Documentary History of Western Civilization. Palgrave Macmillan, London.

2- Author’s interview with Ncamisile Ngubane, August 20, 2025.

3- Gamedze, T. (2025). Christian Zionism in South Africa : An Initial Mapping [Manuscript submitted for publication]. Desmond Tutu Centre for Religion and Social Justice, University of the Western Cape.

4- Gidron, Yotam. Israel in Africa : Security, migration, interstate politics. Bloomsbury Publishing, 2020.

Traduction : C.B. pour l’Agence Média Palestine

Source : Al-Shabaka/ The Palestinian Policy Network

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