Édition du 23 avril 2024

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Crise estivale dans les urgences : le symptôme d’une pénurie généralisée

On le savait. Personne n’avait besoin d’une boule de cristal pour prévoir que ce serait très difficile dans les urgences de plusieurs établissements cet été. Mais contrairement aux années passées, la pénurie de main-d’œuvre est encore plus grave, le réseau est moins préparé que jamais à faire face au pire. Cette situation exceptionnelle dépasse celle des urgences qui font la manchette. Elle affecte tous les centres d’activités.

Les gestionnaires étaient pourtant bien au fait des impondérables susceptibles d’affecter l’offre de service dans le réseau pendant la période estivale. En effet, la pénurie de main-d’œuvre existait bien avant la pandémie. Les vacances estivales reviennent chaque année comme la neige l’hiver. L’exode des professionnelles en soins, provoqué par un mode de gestion coercitif et sans bienveillance au cours de la dernière année, est bien connu des gestionnaires, qui ne sont plus en mesure de combler les postes vacants ou les quarts de travail à découvert.

Nos attentes dans le contexte étaient légitimes. Les établissements auraient dû se préparer en amont, déterminer les centres d’activités prioritaires, mettre sur pied des plans de contingence, moduler les services en fonction du nombre d’effectifs disponibles, informer les équipes de travail et la population. La situation était prévisible. Les équipes locales ont tendu la main pour trouver des solutions et anticiper la crise. Or, rien de tout cela ne s’est produit. Sans plan de match, les gestionnaires ont emprunté le dangereux chemin d’une gestion au jour le jour, privilégiant le recours au TSO plutôt que de vous offrir une bouffée d’oxygène et relâcher la pression qui repose sur vos épaules depuis des mois. Cette avenue place vos patient-e-s à risque, et la situation dans le réseau est devenue explosive, tout simplement invivable sur le terrain.

Chaque semaine depuis plus d’un mois, nous avons porté votre voix auprès du ministre de la Santé et des Services sociaux et lui avons mis de la pression pour que nos demandes pour la période estivale soient mises en place. La situation exceptionnelle dans laquelle nous sommes exige des solutions tout aussi exceptionnelles.

Le diagnostic est simple. Il n’y a plus assez de professionnelles en soins pour donner tous les soins et les services essentiels à la population. Dans ce contexte, nous avons exigé que le ministère s’assure que les services qui demeurent ouverts soient modulés en fonction du nombre de professionnelles en soins disponibles. Pour être en mesure de traverser l’été et de continuer à donner des services de qualité à la population, le recours au TSO n’est tout simplement plus une option. Cette approche complètement dévastatrice doit s’arrêter dès maintenant. Il est urgent de déployer des mesures supplémentaires pour réduire la tension sur le réseau : les ratios sécuritaires doivent être respectés, les blocs opératoires devront fonctionner que pour les cas urgents, la réouverture des places en hébergement est requise immédiatement, des primes estivales sans condition pour les quarts de travail à combler devront être envisagées. Les professionnelles en soins n’ont pas à payer le prix d’années de mauvaise gestion qui ont mené à la crise actuelle.

L’heure est à réparer le réseau et un changement de culture radical s’impose. Le TSO, la négligence, et l’abus de pouvoir n’ont plus leur place dans le réseau de la santé. La grave pénurie de professionnelles en soins a pour conséquence qu’il n’y a plus aucune marge de manœuvre. Nous sommes maintenant à l’heure des choix difficiles. Le gouvernement doit changer de méthode avant d’envisager la reprise des activités en septembre.

Votre mobilisation des dernières semaines a accentué la pression sur le dos des gestionnaires. Nous sommes déterminées à ce que la situation sur le terrain change. Vous avez le droit de reprendre le contrôle sur votre vie et celui de soigner dans des conditions sécuritaires, respectueuses et bienveillantes. Alors que tout le Québec se déconfine, la période estivale doit vous permettre de reprendre votre souffle, de décrocher et de passer du temps avec votre famille et vos proches.

Nous serons là tout l’été pour y veiller.

Nancy Bédard

Présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé (FIQ)

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