22 novembre 2024 | tiré de Pivot
L’OTAN est une alliance militaire réunissant la plupart des pays d’Europe et ceux d’Amérique du Nord, qui s’engage à « défendre la liberté et la sécurité de ses membres par des moyens politiques et militaires ». Elle dit « promouvoir les valeurs démocratiques » et être « attachée à la résolution pacifique des différends ».
Mais à l’approche de son assemblée, les mobilisations de la société civile contre l’OTAN se multiplient. Plusieurs manifestations et activités de sensibilisation sont prévues cette fin de semaine, appelant au retrait du Canada de l’alliance militaire euro-atlantique.
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Le collectif Désinvestir pour la Palestine, la Convergence des luttes anticapitalistes, le collectif Échec à la guerre et le Mouvement québécois pour la paix organisent plusieurs manifestations les 22 et 23 novembre.
Le collectif Désinvestir pour la Palestine organise également un rassemblement suivi d’une performance artistique le 21 novembre.
Le Réseau pan-canadien pour la paix et la justice organise pour sa part un contre-sommet intitulé « Non à l’OTAN, oui à la paix » le 24 novembre.
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« Investir dans l’OTAN, dans la soi-disant « défense », ce n’est pas investir dans la paix, c’est investir dans la guerre, dans le militarisme et dans l’impérialisme », déclare Benoît Allard, porte-parole du collectif Désinvestir pour la Palestine.
« L’OTAN n’est pas une alliance défensive, c’est une machine de guerre, de mort, de destruction », dénonce Raymond Legault, porte-parole du collectif Échec à la guerre, en énumérant les conflits armés dans lesquelles l’OTAN s’est lancée au cours des 30 dernières années : Irak, Kosovo, Afghanistan, Libye, Syrie…
Notamment, la guerre « contre le terrorisme » initiée par les États-Unis après le 11– Septembre a causé plus de 4,5 millions de morts directes et indirectes et a créé au moins 38 millions de personnes déplacées, selon des estimations de l’Institut Watson d’affaires publiques et internationales, à l’Université Brown.
« Il faut réveiller le public, mais aussi remettre en question l’agenda de l’ensemble de la classe politique canadienne et québécoise, qui n’ose plus dire un mot contre l’OTAN », souligne Alex Tyrrell, chef du Parti vert du Québec et co-organisateur du contre-sommet.
« Ce qui construit la paix et la sécurité, c’est la solidarité entre les peuples qui se mobilisent pour la paix, pour la réduction des inégalités et des injustices. »
Benoît Allard, Désinvestir pour la Palestine
Aujourd’hui, face à l’escalade des conflits en Ukraine et au Moyen-Orient, les groupes pacifistes affirment aussi qu’il est urgent que les Canadien·nes prennent l’initiative de rebâtir le mouvement pour la paix. Ils appellent les citoyen·nes à descendre dans la rue pour manifester leur opposition à la guerre, comme ils et elles l’ont fait en 2003 contre l’invasion de l’Irak, quand 200 000 personnes avaient pris les rues de Montréal, un événement record à l’époque.
Doublement des dépenses militaires
En 2006, les ministres de la Défense des pays de l’OTAN ont convenu que les alliés consacreraient au moins 2 % de leur produit intérieur brut (PIB) au budget militaire, afin d’assurer une disponibilité opérationnelle à l’échelle de l’alliance. Lors du dernier sommet de l’OTAN, qui s’est tenu en juillet 2024 à Washington, deux tiers des alliés avaient atteint cet objectif.
Le premier ministre canadien, Justin Trudeau, a réaffirmé l’engagement du Canada à l’atteindre d’ici 2032-2033. Pour ce faire, selon la projection du Directeur parlementaire du budget, les dépenses de défense nationale devraient s’élever à 81,9 milliards $ d’ici 2032-2033, soit près du double du montant prévu pour 2024-2025, estimé à 41 milliards $.
De plus, comme convenu par les alliés de l’OTAN au sommet de Vilnius en 2023, le Canada s’engage également à consacrer 20 % de ces dépenses à l’acquisition de nouveaux équipements majeurs, y compris la recherche et le développement liés, afin d’assurer une modernisation rapide de ses capacités militaires.
« Ce n’est absolument pas nécessaire à la sécurité de la population canadienne », dénonce Raymond Legault. « L’OTAN est de très loin l’alliance militaire la plus armée dans le monde. »
En effet, les dépenses militaires de la trentaine de membres de l’OTAN représentent 55 % du total mondial, selon l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI). À elles seules, les dépenses militaires des États-Unis ont constitué 37,5 % des dépenses mondiales, soit plus que le total des neuf autres pays en tête de liste, incluant la Chine et la Russie.
« Investir dans l’OTAN, c’est investir dans la guerre, dans le militarisme et dans l’impérialisme. » Benoît Allard
« C’est inacceptable d’investir davantage dans l’armée alors qu’il y a des besoins criants ailleurs », déplore Benoît Allard.
« Ça risque d’avoir des impacts désastreux sur l’ensemble de nos politiques sociales », soutient Raymond Legault.
Les groupes pacifistes soulignent que ce n’est qu’un des nombreux exemples où les grandes puissances de l’OTAN, notamment les États-Unis, influencent voire déterminent la politique canadienne, par exemple en l’incitant à participer à des opérations militaires.
Complice d’Israël
Au cours des sept dernières décennies, les alliés de l’OTAN ont fermement soutenu Israël, y compris dans l’occupation et la colonisation illégales du territoire palestinien ainsi que dans le génocide en cours à Gaza.
« Sauf de rares exceptions, la complicité ou l’inaction des pays membres de l’OTAN, qui se contentent d’appeler à un cessez-le-feu sans la moindre sanction contre Israël, nous donne la mesure réelle de leur attachement aux droits humains et au droit international », déplore le collectif Échec à la guerre dans un communiqué.
Ce sont les mêmes puissances majeures qui avaient soutenu la création de l’État d’Israël au milieu du 20e siècle, dont des États coloniaux tels que les États-Unis et le Royaume-Uni.
En 1987, le président américain de l’époque, Ronald Reagan, avait désigné Israël comme un allié majeur non-membre de l’OTAN. Cela a permis aux pays membres de collaborer plus étroitement avec Israël, notamment en matière de recherche, de développement et de transfert d’armements.
Entre 2013 et 2022, la quasi-totalité des armes importées en Israël provenait de deux pays de l’OTAN, soit les États-Unis et l’Allemagne, selon SIPRI.
Notamment, depuis octobre dernier, les États-Unis ont fourni plus de 10 000 munitions MK-84 à Israël, un type de bombe de 2 000 livres que les forces américaines n’ont presque jamais utilisé dans des zones densément peuplées. Israël, en revanche, en a largué même dans des camps de réfugié·es.
Aujourd’hui, après plus de treize mois de génocide à Gaza, plusieurs pays de l’OTAN continuent d’armer Israël. Dans le cas du Canada, des composantes d’armement sont encore acheminées vers Israël, bien que la ministre des Affaires étrangères du Canada, Mélanie Joly, ait déclaré la suspension d’une trentaine de permis d’exportation de marchandises militaires vers Israël.
« Il faut réveiller le public, mais aussi remettre en question l’agenda de l’ensemble de la classe politique canadienne et québécoise, qui n’ose plus dire un mot contre l’OTAN. »
Alex Tyrrell, Parti vert du Québec
Benoît Allard dénonce que cette collaboration étroite en matière de défense fait d’Israël un laboratoire de l’OTAN pour le développement d’armements. « Les armements qu’Israël a expérimentés sur les Palestinien·nes seront réutilisés par les puissances de l’OTAN dans des conflits et des interventions militaires ailleurs dans le monde, mais aussi contre leur propre population civile. »
Construire la paix
Les groupes pacifistes soulignent que la défense de la sécurité dont se réclame l’OTAN ne sert que les intérêts de certains États occidentaux, au détriment de ceux des populations du Sud global.
Ils soutiennent aussi que la paix et la sécurité ne se construisent pas par les armes.
Benoît Allard fait valoir qu’en se livrant à une course à la puissance militaire, on se retrouve dans une sécurité illusoire. « Si votre voisin s’achète un fusil pour se protéger, il y a des chances que vous vous disiez que la solution est de vous acheter un plus gros fusil pour vous sentir en sécurité », explique-t-il. « Mais c’est un jeu à somme nulle. »
« L’OTAN considère les armes nucléaires comme la garantie ultime de la sécurité de ses pays membres. Ça fait en sorte qu’aucun des 32 pays membres n’a signé le traité sur l’interdiction des armes nucléaires », ajoute Raymond Legault. « C’est absolument suicidaire. Les armes nucléaires menacent l’existence de toute l’humanité. »
« Ce qui construit la paix et la sécurité, c’est la solidarité entre les peuples qui se mobilisent pour la paix, pour la réduction des inégalités et des injustices », souligne Benoît Allard. « Ce sont, par exemple, les blocages des ouvriers portuaires partout dans le monde, qui refusent que leur travail serve à transférer des armes à un état génocidaire, comme c’est le cas d’Israël. »
Selon Benoît Allard, face à la montée de l’extrême droite partout dans le monde, « c’est clair qu’on ne peut pas compter sur nos États et nos gouvernements pour freiner la marche du militarisme. Il faut qu’on le fasse par nos propres moyens, sur nos propres bases, en nous mobilisant dans la rue, sur nos milieux de travail, pour exiger la fin du financement militaire et des guerres impérialistes ».
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