Édition du 26 mars 2024

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Canada

Élections fédérales : l’État canadien, le grand ami des États-Unis

Le terrible cafouillage à l’aéroport de Kaboul a rappelé à tout le monde l’incurie du gouvernement de Justin Trudeau dans la catastrophe afghane. Dès 2001, Ottawa (alors sous la gouverne de Jean Chrétien) s’est précipité avec les États-Unis dans la « guerre sans fin », avec le résultat que l’on constate aujourd’hui. Des milliards de dollars gaspillés (notamment dans une « aide au développement » qui est devenue une prime à la collaboration et la corruption) et des milliers de vie gaspillées (dont plus de 160 militaires canadiens). Une population réduite à la mendicité et des nouveaux gouvernants qui étaient considérés jusqu’à peu comme d’effroyables « terroristes ».

26 août 2021 | tiré des Nouveaux Cahiers du Socialisme

Triste bilan, qui résulte de plusieurs années d’une politique sans bon sens. Peu après l’invasion de l’Afghanistan, Ottawa appuyait l’attaque contre l’Irak sans le dire, en cachette. Des navires canadiens ont été dépêchés dans le golfe pour « prévenir des attaques irakiennes, alors que les États-Unis entreprenaient la terrible guerre qui a duré jusqu’à 2020. L’Irak est aujourd’hui anéantie, affamée, en proie aux milices. Encore récemment, l’armée canadienne secondait les États-Unis dans la « guerre contre Daesh » qui a mené à la destruction du nord du pays.

Parallèlement, l’état canadien a continué de défendre la colonisation israélienne des territoires palestiniens, en condamnant, du bout des lèvres, les violations de droit, tout en tentant de saboter la campagne pour des sanctions (BDS). Le sordide commerce des armes avec l’Arabie saoudite a continué, pendant que la guerre contre le Yémen a mené à la plus grave crise humanitaire du moment. Que pasa à Ottawa en ce moment ? Un silence assourdissant, semé de déclarations consternantes et banales du ministre des Affaires extérieurs Marc Garneau, un champion du mensonge et du détournement de sens.

Le meilleur ami de Washington

Dans les Amériques, le Canada a tenté d’imposer le « libre échange » malgré les défaites politiques infligées par les peuples latino-américains. Les « partenaires » ont été choisis en fonction de leur allégeance au projet américano-canadien, comme la Colombie, le Brésil et le Honduras, où on pratique la violation des droits de manière systématique. Peu importe pour Ottawa, il est préférable de condamner le Nicaragua. Face aux gouvernements progressistes qui ont tenté de changer le cours, le Canada de Harper à Trudeau est resté hostile. La seule incursion de Trudeau dans l’hémisphère a été pour féliciter l’ultra libéral Mauricio Macri en Argentine, avant qu’il ne soit renvoyé chez lui après d’immenses manifestations. La priorité reste la défense inconditionnelle et absolue des investissements miniers canadiens qui abondent dans les pays andins entre autres. Partout des communautés se lèvent et demandent le respect des droits humains et de l’environnement et identifient les Barrick Gold de ce monde. La « cerise sur le sunday », si on peut dire, reste l’appui de Trudeau à la clique en Haïti menée pour empêcher le changement réclamé par une grande majorité de la population.

La débandade

Vaincu à plate couture lors des élections au Conseil de sécurité de l’ONU en 2019, le Canada est devenu une risée, sans légitimité ni crédibilité dans les arènes internationaux. En Afrique, le programme d’aide au développement a été contraint et instrumentalisé au nom d’une « politique féministe » qui gère la lente destruction de l’intervention canadienne dans ce domaine, amorcée par Harper et continuée par Trudeau, en partie parce que l’appareil du Ministère des affaires extérieurs (baptisé maintenant de « Affaires globales Canada ») a été en bonne partie cassé, tel que l’explique le Groupe McLeoud, composé d’ex cadres du gouvernement, amèrement déçus par ce qui prend l’allure d’une véritable débandade.

Le Canada fait toujours partie du G7, parce que les États-Unis insistent, alors que l’Union européenne, entre autres, considère le Canada non seulement comme l’allié-subalterne qu’il a toujours été, mais comme un État sur lequel on ne peut plus compter et qui reste au G7, à l’OTAN et ailleurs, par défaut.

Tintin en Chine

Tout au cours des dernières années, Justin Trudeau et Chrystia Freeland se sont vantés d’avoir sauvé l’entente de libre-échange (l’ALÉNA). En réalité, l’entente a été reconduite par défaut, sans changement sur l’essentiel, notamment sur l’hégémonie américaine qui a pris des allures caricaturales sous Trump. Plus récemment, Joe Biden, un autre grand ami d’Ottawa, a maintenu d’autres mesures contre les exportations canadiennes (bois d’œuvre, acier, aluminium). Le « libre » échange reste libre pour qui ?

Entretemps, les États-Unis sont lancés dans une nouvelle guerre contre la Chine qui pour le moment, reste surtout économique, mais où se profile en Asie-Pacifique de grands affrontements au moment où le Pentagone en fait une priorité. Quoi d’autres alors que la participation canadienne au China-bashing. Il est clair qu’Ottawa veut mettre des bâtons dans les roues dans une vaste stratégie dont l’ »affaire » Meng Wenzhou, détenue contre son gré à Vancouver depuis trois ans, est révélatrice. On accuse la Chine d’être coupable d’un « génocide » dans le Xinxiang où la minorité ouighour est persécutée, ce qui a une mauvaise odeur alors que d’autres massacres en cours, en Israël, en Arabie saoudite, au Yémen, en Colombie, en Éthiopie et ailleurs, sont passées sous silence à Ottawa, à part d’obscurs communiqués pour ne rien dire.

« We are back » !

Ce redéploiement de l’impérialisme américain contre la Chine n’annonce que de nouvelles confrontations. À moins d’un virage spectaculaire, on pourra compter sur Ottawa pour rester le cheerleader en chef des dangereuses aventures militaires américaines déployées partout dans le monde. Lors de son élection en 2015, Justin Trudeau avait dit que le Canada était de « retour » (« We are back » !), laissant sous-entendre qu’il allait détourner le pays des sombres desseins de Stephen Harper. Et 8 ans plus tard ?

À Kaboul comme à Bogota, Port-au-Prince et Jérusalem, le Canada reste paralysé dans une politique extérieure disjonctée, totalement soumise aux diktats américains. Cela explique peut-être un peu que la campagne électorale a évité, jusqu’à présent à part l’histoire de Kaboul, des débats sérieux sur ce sujet. Le Parti Libéral comme dans sa tradition se contente de dire des banalités. Le Parti conservateur reste l’ardent militant d’une intégration totale dans l’Empire américain qu’il est depuis longtemps. Le NPD et le Bloc Québécois rivalisent de médiocrité en évitant de questionner cette grande médiocrité autrement que sur la forme. On ne peut pas dire vraiment qu’on s’en va ailleurs que dans la continuité.

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