Édition du 23 avril 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Québec

Électricité bradée et privatisation :

Transition énergétique mon œil !

Depuis principalement le début du deuxième mandat caquiste, c’est un euphémisme de dire que les repaires habituels de la population québécoise sont bousculés. Au début des années 2020, on était dans le surplus énergétique confortable et Hydro-Québec offrait cette image rassurante de navire amiral de notre économie. En l’espace de quelques mois, on est passé à un climat de panique où il faudrait plus que doubler la production d’électricité. Hydro est pratiquement devenu un bazou passé de mode et prêt pour la casse. Malgré l’hiver exceptionnellement doux qu’on vient de connaître, certains ont même évoqué le spectre du bris de service. Même l’énergie nucléaire reprend du galon.

Évidemment, on connaît la raison de ce virage. Prétextant la transition énergétique, le gouvernement a ouvert toute grande la porte aux entreprises voulant profiter de nos bas tarifs d’électricité. À 5,3 sous le kilowattheure pour la grande industrie, nos tarifs sont parmi les plus bas au monde mais ce n’était pas suffisant puisque jusqu’au 31 décembre dernier, les entreprises avaient la possibilité de demander un rabais de 20% sur ce tarif, rabais applicable jusqu’en 2032. Fin octobre, lorsque le gouvernement a annoncé la date limite du 31 décembre, déjà 82 des 165 clients industriels s’étaient prévalus du rabais. Suite à son annonce, on sait que les entreprises se sont garrochées. On ne connaît pas encore le nombre et la liste est confidentielle, top secret commercial... On sait cependant les chiffres des entreprises toutes catégories qui ont demandé des capacités supplémentaires d’électricité s’élève à 150. Même le très prodigue Fitzgibbon annonce qu’il ne pourra répondre favorablement à toutes les demandes faute d’énergie disponible. Du même souffle… il invite les entreprises à l’auto-production d’électricité. Et les cadres d’Hydro-Québec dirigés par Monsieur privatisation Michael Sabia de reprendre le message. Peut-être que l’augmentation de 21% des primes en 2023 encourage… Ainsi, nos p’tits copains de la CAQ, non seulement vont s’enrichir avec l’électricité à vil prix mais en plus on va attaquer sérieusement le monopole d’Hydro. Le monde des affaires est aux anges. N’en jetez plus, la cour est pleine. Quel pactole que cette transition énergétique !

Et voilà maintenant que sur le vaste territoire québécois, les éoliennes s’apprêtent à contester aux épinettes leur statut dominant. C’est la frénésie actuellement. En 2023, le Québec comptait 1500 éoliennes. D’ici 2035, Hydro-Québec compte tripler la production actuelle (4000 mégawatts). Selon le plan Sabia, les éoliennes supplémentaires occuperont l’équivalent de 15 fois la superficie de l’île de Montréal.

Comme des enfants qui ont trouvé un truc nouveau, les caquistes justifient tous ces chambardements en parlant de transition énergétique. Leurs critères concernant l’octroi de la réduction de 20% aux entreprises sont simples : augmentation de la production, amélioration de la productivité ou ajout d’une nouvelle production. À ce compte, le Québec fait de la transition énergétique depuis le début du XXième siècle lors de la construction de ses premiers barrages . C’est si peu de la transition énergétique que même l’expression écoblanchiment paraît déplacée. Il faut tout simplement parler d’électricité bradée et d’accélération du processus de privatisation d’Hydro-Québec, tout ça au profit des p’tits copains. Duplessis est passé à l’histoire avec son fer à 1 cent la tonne, Legault risque de le faire pour son électricité à 4 sous le kilowattheure.

L’hypocrisie des caquistes saute aux yeux quand on prend en considération ses agissements en matière d’environnement. Au début de mars, le ministre de l’environnement n’a surpris personne en révélant que c’est par crainte de voir Northvolt s’installer ailleurs que le gouvernement caquiste a bafoué toutes les règles environnementales régissant le Québec . Pour les installations d’éoliennes, les caquistes ont aussi assoupli les règles. Ces actions sont d’ailleurs tout ce qu’il y a de plus cohérent avec l’ensemble de leur œuvre. On n’a qu’à penser à la fonderie Horne, aux émanations de cuivre dans le port de Québec, au traitement des caribous ou encore à leur inaction totale dans le transport en commun, les faits démontrent à l’envie que la transition énergétique sert de faible prétexte à la dollarisation et la privatisation de l’électricité. Le ministère de l’environnement en est réduit à être l’essuie-pied du super-ministre Fitzgibbon.

Pourtant, des solutions existent qui n’ont pas besoin de bouleverser les acquis fondamentaux de la société québécoise. Un, dans une période de rareté de main d’œuvre, il est illogique de favoriser un développement industriel tout azimut. Pour pallier cette rareté, on a ouvert toutes grandes les portes aux travailleurs étrangers ce qui a pour effet d’accentuer la crise du français, celle du logement et de mettre sous pression l’ensemble de nos services publics qui sont déjà plutôt mal en point. On note au passage que cette main d’œuvre bien vulnérable comble d’aise le p’tits copains. Deux, ce qui était acceptable en période de surplus d’électricité devient aberrant en période de pénurie. Le Québec a signé deux contrats de vente d’électricité avec le Maine et la Ville de New York. À eux seuls, ces contrats représentent 10% de la production d’électricité actuelle d’Hydro-Québec. En période de surplus, ces contrats étaient avantageux. En période de pénurie, le coût de construction des installations nécessaires pour honorer ces contrats les rend déficitaires. En plus de l’électricité, c’est de l’argent que nous allons exporter, de l’argent tiré de la poche des consommateurs québécois d’électricité. La résiliation de ces deux contrats s’impose. Trois, avant de tapisser le territoire du Québec de parcs éoliens, il faudrait exploiter le potentiel offert par le territoire des grands barrages. En plus d’offrir une connexion facile au réseau, ces territoires ont l’avantage d’être éloignés des populations minimisant d’autant la pollution visuelle et sonore des parcs éoliens.

Terminons maintenant avec la cerise sur le sundae. Voilà que notre pyromane en chef Fitzgibbon joue les pompiers en pointant un doigt accusateur vers les consommateurs ordinaires d’électricité en disant qu’ils gaspillent notre précieuse ressource. C’est le comble, celui-là même qui favorise la vente de feu de nos kilowattheures et la privatisation d’Hydro-Québec se permet de nous faire la leçon. Comme dirait l’autre « Plus c’est gros, plus il y a de chances que ça passe ». Qu’on ne s’y trompe pas. Comme à son habitude, notre cher super-ministre maquille de mots vertueux une immense couleuvre. Ainsi, en divisant les Québécois entre bons et mauvais consommateurs, on tasse ces derniers dans le coin ouvrant la porte à des augmentations de prix que tout le monde va souhaiter. La désignation d’un délinquant, c’est la première étape vers la remise en question d’un programme universel. Il s’agit d’un procédé classique. De plus, pendant que la populace se chicane entre elle, notre stratège en chef continue bien tranquillement à jouer au Père Noël avec notre acquis collectif.

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