3 février 2025
Peu d’entre nous, ont cependant fait ressortir les raisons profondes qui sont à l’origine d’un tel renversement, et surtout ont cherché à sonder les moyens qu’on pourrait mettre de l’avant pour en confronter les dangers, en déjouer les lubies mortifères. Comment se protéger de l’autoritarisme crasse et narcissique de tels individus, et surtout comment stopper la montée politique de la droite-extrême dont ils sont l’expression même, tout en redonnant au passage à la gauche —au camp des progressistes— la force collective qui lui manque dramatiquement pour inverser le cours de l’histoire présente ?
En toute lucidité, il faut pourtant le reconnaître : cette arrivée de la droite-extrême fascisante au gouvernement des USA comme sa présence aux portes du pouvoir dans bien des pays du monde (y compris au Canada), tiennent aussi à l’incapacité de la gauche institutionnelle à s’y opposer fermement, et plus particulièrement aux choix politiques entérinés par la vaste nébuleuse progressiste qui a eu pignon sur rue ces dernières années en Occident et a fini par se rallier –corps et âme— au capitalisme néo-libéral et à sa démocratie libérale de basse intensité.
Un malaise social grandissant
C’est ainsi que cette dernière s’est montrée incapable de saisir les conséquences funestes de l’épuisement du cycle d’expansion et de renouveau initié après la seconde guerre mondiale. Et qu’elle est passée à côté non seulement des inégalités socio-économiques qui n’ont cessé de déchirer en profondeur le tissus social, mais aussi du malaise grandissant qui s’installait dans de larges secteurs de la population à la suite des multiples crises qui, depuis le début du millénaire se sont amplifiées puis combinées les unes aux autres : économique, sanitaire, écologique, politique, culturelle, etc.
Incapable dans ce contexte, de contre-proposer aux sourdes inquiétudes collectives qui s’exprimaient chaque fois plus, un projet politique globalisant, positif et pacifiant, susceptible de contrecarrer le repli identitaire et les logiques du bouc-émissaire brandies par la droite, la gauche institutionnelle n’a pu opposer à l’extrême-droite montante qu’un front désuni, fragmenté, en tous points déconnecté des enjeux réels et des angoisses vécues de larges secteurs de la population.
En ce sens, il faut oser se le dire : comprendre ce qui nous arrive avec Trump, c’est aussi prendre acte de tout ce qui nous revient en propre —nous qui avons rêvé au Québec dans le sillage de la révolution tranquille à plus d’égalité sociale — et qui nous a conduit à nous retrouver en position défensive, enfermés plus souvent qu’autrement dans les seules logiques de l’indignation.
Il n’est pourtant pas trop tard pour réagir et nous montrer à la hauteur des formidables enjeux qui se dressent devant nous. Il est temps de rebondir, d’échapper tant au découragement qu’au cynisme ou encore au repli sur soi. Aux USA bien sûr, mais aussi au Canada et au Québec. Comme récemment l’écrivait Françoise David dans Le Devoir : « Opposons au défaitisme une mobilisation sociale et politique nationale, rassembleuse et forte (...) Ne nous contentons pas de peu. On n’est plus nés pour un p’tit pain ! ». En sachant.. cependant que cette mobilisation si nécessaire ne peut être —tant les défis qui se dressent devant nous sont vastes— que sociale et politique, le fait autant des mouvements sociaux que des courants politiques qui se reconnaissent de la gauche et de la lutte pour l’égalités sociale : syndicats, mouvements communautaires, mais aussi forces politiques de gauche.
Des États généraux ?
Pourquoi ne pas alors organiser au Québec des États généraux du mouvement populaire et progressiste québécois ? Des États généraux, pour nous donner les moyens depuis le progressisme, de comprendre ce qui est en train de nous bousculer si tragiquement, et pour nous permettre d’y faire face en nous mobilisant enfin autour de mêmes objectifs sociaux et politiques partagés. Car il ne suffit plus aujourd’hui de manifester devant le parlement afin de faire connaître en toute civilité nos mécontentements respectifs auprès des gouvernements en place. Il faut réapprendre à redevenir une force collective qui compte et puisse avoir enfin prise sur l’ordre des choses, peser en somme dans les batailles à venir !
N’est-ce pas en ces temps difficiles, ce à quoi nous devrions occuper nos efforts ?
Pierre Mouterde
Sociologue et essayiste
Québec, le 2 février 2025
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