Édition du 23 avril 2024

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Le blogue de Pierre Beaudet

La fin du monde approche

Les multitudes du monde entier sont sorties dans la rue cette semaine pour nous alerter sur les changements climatiques. Leur message sera-t-il entendu à Paris ? Il semble qu’il se prépare un autre cocktail mitigé de bonnes intentions et de « projets », ce qui évite d’aller à l’essentiel. Il est encore tôt pour prédire la fin de cette discussion, mais on doit rester sur nos gardes.

Pour le moment, c’est la composante environnementaliste du mouvement social qui a le « lead » sur ces manifestations, ce qui est normal. Pour autant à Ottawa, une très grande partie des Québécois présents (au moins 5 000 personnes) venaient du mouvement syndical et des groupes populaires. Ce qui veut dire en clair que la cause environnementale n’appartient pas à quelques groupes, ce qui est très bien comme cela.

Pour plusieurs mouvements populaires, la destruction programmée de l’environnement fait partie d’un ensemble, on pourrait dire, d’un « projet de société ». Ce projet, c’est celui du capitalisme, un système dont les clés sont l’accumulation, la marchandisation et le profit. Les structures qui sont les moteurs de ce développement capitaliste, soit les entreprises privées, n’ont d’autre rationalité que celles-là. Ce n’est pas une question de morale, ce n’est pas parce que les « agents » (les capitalistes en chair et en os) sont « méchants ». Pour survivre dans ce système, il faut « vendre pour vendre », lutter contre tout le monde, y compris contre ses travailleurs pour préserver le profit, et prendre tous les moyens pour éliminer les compétiteurs. Alors là, on comprend que la protection de l’environnement devient une question secondaire, un effet « collatéral » qu’il faut, au mieux, contrôler.

Bref le capitalisme dans son inexorable voracité tue les assises humaines et naturelles sur lesquelles il est assis, quitte à le faire à « petit feu ».

Mais là apparaît dans ce tournant du siècle une crise de plus. La destruction de l’environnement commence à coûter trop cher, à nuire aux profits. En plus, il y a trop de gens qui sont mécontents. Les élites du 1% ne sont pas bêtes, plusieurs sont d’accord pour s’adapter. Cela s’appelle le capitalisme vert. Ou bien, comme on dit dans le milieu, « polluer moins pour polluer plus longtemps ».

Face à cette situation, la convergence entre les mouvements populaires et les organisations environnementales devient un défi. Parmi ces dernières, les impacts de cette situation comptent davantage que les causes qui semblent à plusieurs personnalités, comme David Suzuki, comme une question « trop politique ». Lors de la manifestation à Ottawa dimanche dernier, le ton donné par les groupes environnementalistes était d’« appuyer » le gouvernement Trudeau.

Une autre manière de voir les choses a cependant été exprimée par les autochtones qui ont dit haut et clair que le problème, c’était le système et que, beau discours ou mauvais discours, il fallait s’opposer au pipeline Énergie-est, appuyé par Trudeau justement.

Le problème, notre problème, n’est pas strictement environnemental. Il est global et systémique. La « fin du monde » prévue par Hollywood et certains groupes environnementaux ne viendra pas de la fonte des glaciers. Et ce monde ne sera pas « sauvé » par le capitalisme vert ou des gouvernements plus sensibles (ou plus intelligents). Il faudra bifurquer d’une manière plus fondamentale, et dans ce tournant, la perspective écologiste sera très importante en tant que composante d’une lutte globale qu’on pourrait encore appeler anticapitaliste.

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