L’IEDM exagère, le gouvernement obéit
L’Institut économique de Montréal (IEDM) agitait récemment l’épouvantail d’une « épidémie de grèves », accusant le Québec d’être l’épicentre de 91 % des conflits de travail au Canada depuis 2023. L’IEDM réclame d’ailleurs une intervention encore plus sévère du gouvernement, en élargissant la portée du PL89 aux travailleuses et travailleurs de la santé et de la fonction publique. Mais derrière ces chiffres choc, la réalité est bien différente.
Des chiffres trompeurs qui déforment la réalité
Contrairement au portrait alarmiste dressé par l’IEDM, les conflits de travail sont en chute libre au Québec depuis les années 1970. L’année 2024, présentée par l’IEDM comme une année record avec 700 conflits recensés, inclut surtout la mobilisation exceptionnelle du Front commun, regroupant à elle seule plus de 400 accréditations syndicales et autant de conflits de travail au sens de la loi. Les autres conflits ? Rien d’étonnant : ils étaient principalement liés aux pénuries et à l’inflation galopante, poussant les travailleuses et les travailleurs à exiger un traitement équitable.
Il est bon de rappeler que la grande majorité (95 %) des négociations se règlent sans conflit de travail. Alors, pourquoi changer les règles d’un jeu qui fonctionne ?
De mauvais perdants au pouvoir
Soyons clairs : le gouvernement n’a tout simplement pas digéré l’issue de la dernière négociation du secteur public. Depuis des décennies, les règles du jeu étaient à son avantage, mais, maintenant qu’il est mécontent du résultat, il les modifie en sa faveur. Pourtant, dans le contexte actuel où collaboration et dialogue sont nécessaires, s’en prendre au droit de grève n’est pas seulement injustifié, c’est contre-productif.
Le droit de grève n’est pas un caprice syndical : c’est un droit constitutionnel fondamental, durement acquis et défendu devant les tribunaux pendant des décennies. La CSQ refuse catégoriquement ce recul et le martèle : ce projet de loi est un véritable sabotage du rapport de force des travailleuses et des travailleurs.
Négocier à armes égales, c’est vital
Depuis 1964, date où le Code du travail a officiellement reconnu le droit de grève dans les services publics, la définition des services essentiels a toujours été strictement liée à la santé et à la sécurité publique. Aujourd’hui, le gouvernement introduit une notion vague et dangereuse : le « bien-être » de la population.
Ce flou juridique soulève des inquiétudes majeures : sans critères clairs, comment le Tribunal administratif du travail (TAT) pourra-t-il juger équitablement des services à maintenir ? Cette notion imprécise risque simplement d’annuler tout effet réel des grèves, transformant un droit fondamental en geste symbolique sans impact réel.
La grève, un outil de dernier recours
La grève, rappelons-le, n’est jamais prise à la légère par les travailleuses et les travailleurs. Elle implique une perte de salaire, une pression énorme et une incertitude sur le retour au travail. Mais elle reste indispensable quand les négociations bloquent, garantissant un rapport de force équitable entre employeurs et employés.
Le projet de loi no 89 est donc une attaque frontale et injustifiée contre ce droit précieux. Une grève qui ne dérange personne ne fait avancer aucune négociation. Et sans avancées dans les négociations, c’est toute la société québécoise qui en paie le prix.
Bref, le PL89 est une erreur stratégique, politique et sociale que la CSQ entend bien combattre avec vigueur, n’en déplaise aux majorettes du patronat.
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