Édition du 26 mars 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Opinion

Que les citoyenNEs demeurent les maîtres du jeu

Un Rabaska de moins, un parti de gauche de plus !

Dans le dossier Rabaska, les citoyenNEs peuvent protester. Ils et elles peuvent même arriver à imposer un recul du pouvoir en place. Par contre, la construction d’un parti de gauche de masse devra dorénavant faire partie de l’agenda public pour donner une certaine cohérence à toutes les luttes partielles, qui confrontent directement le pouvoir influencé par le néolibéralisme.

Si le BAPE, une institution de l’État libéral, peut en imposer à une volonté populaire quand les enjeux deviennent critiques pour les citoyenNEs et que les décisions économiques et politiques heurtent la manière dont ils et elles ont décidé d’aménager leur vie, tout en ne s’opposant pas à ce qui contribuerait au bien commun, comment arriver à réformer ce bras de l’État pour qu’il ne devienne pas un instrument de plus du libéralisme économique ; pour qu’il ne devienne pas ce qu’il est urgent de contester sur le terrain politique dès maintenant : un autre porte-voix de l’ambiance néolibérale qui contamine les moyens démocratiques à la disposition des citoyenNEs ? Comment venir à bout de cette domination de l’économique sur le politique, de l’hégémonie des gens d’affaires sur la volonté exprimée des citoyenNEs concernéEs par leurs projets ?

C’est le même pouvoir qui veut s’édifier en dépit du danger, de l’insécurité, de la destruction du patrimoine, et de bien d’autres nuisances écologiques. C’est le même pouvoir qui ferme sans état d’âme des usines rentables (mais jamais assez selon lui), en jetant à la rue des milliers de travailleur-euse-s.

Alors, comment endiguer ce pouvoir, comment le circonscrire dans les limites de ce qui reste sous la maîtrise de la population ? Comment faire que des communautés entières, comme celle de Vallée-Jonction durant la grève d’Olymel, ne soient pas soumises aux impératifs de ce capitalisme débridé ?

On a raison de se sentir inconfortable avec tout cet arsenal de lois qui finiraient par autoriser Rabsaka. Si vraiment le droit est à ce point favorable aux seuls entrepreneurs, il y a quelque chose que le législateur a négligé.

De toutes façons, tant que la grande masse sera asservie sous la tutelle d’un pouvoir qu’elle aura délégué à d’autres qui servent de contrefort à Rabaska, il ne faudra pas s’étonner que des « organisme populaires » comme « À Bon Port » jouent le jeu de ces pouvoirs.

Mais ce que le débat démocratique permet, tout au moins dans la marge de manœuvre autorisée par les média privés ou publics, ce que le débat démocratique finit par autoriser, c’est une expression limitée de la contradiction des plaidoyers.

Pour Rabaska, les citoyen-ne-s peuvent protester. Ils et elles peuvent même l’emporter dans l’argumentaire et conquérir une opinion publique ambivalente, jusqu’à imposer un recul du pouvoir comme pour Oxford ou le Suroît. Une victoire dans ce domaine porterait à la jubilation et la reconnaissance générale, même parmi les plus virulents partisans actuels du projet, d’une victoire de la démocratie et du pouvoir citoyen.

Ce pouvoir cependant resterait local, partiel et devrait repartir à zéro dans la contestation suivante si les militant-e-s ne prenaient la peine de réfléchir à une étape suivante, au pas à franchir de plus sur la longue marche vers le contrôle démocratique des institutions qui ne cessent de proclamer leur légitime existence pour laisser le dernier mot aux citoyen-ne-s impliqué-e-s

Il n’y a pas de doute que la construction d’un parti de gauche de masse devra dorénavant faire partie de l’agenda public pour donner une certaine cohérence à toutes ces luttes partielles, éparpillées qui confrontent directement le pouvoir influencé par le néolibéralisme.

Alors, ce pouvoir citoyen ne prendra réellement forme que s’il se donne l’instrument politique qui comblera rapidement les vides engendrés par les décisions successives et impopulaires des parlements. Il n’y pas véritablement de lutte qui aboutissent à une élévation des débats politiques et à un progrès véritable de l’espace public concédé aux citoyen-ne-s, sans que ne se pose les exigences de la construction et de l’édification de Québec solidaire.

Les décisions des parlements qui heurtent les citoyen-ne-s créent un appel d’air, une aspiration vers le haut, une urgente nécessité de mettre en commun les énergies militantes pour offrir à la grande masse, happée de son côté par l’argumentaire néolibéral, une issue aux contradictions insolubles par le pouvoir traditionnel, qui justifiera et donnera du sens à ses aspirations.

Sans la mise en œuvre bien consciente et résolue d’un Québec solidaire audacieux, les luttes repartiront à zéro à chaque fois. Ou seront récupérées par l’ADQ, le PQ ou les Libéraux au nom de l’alternance démocratique qui les sortira de l’opposition, mais les gardera toujours loyaux envers le système de représentation traditionnelle.

Alors, à mesure que Québec solidaire gagnera en influence, « l’expression libre » de la réaction voulant étouffer tout progrès véritable que des citoyen-ne-s mobilisé-e-s entrevoient pour leur société, le pseudo immobilisme que provoquerait la participation la plus large possible des citoyen-ne-s, ce progrès de société novateur passera par la riposte de Québec solidaire, sa construction dans l’actualité politique et sa maturation comme l’instrument politique de tout-e-s ceux et celles qui veulent faire de la politique et qui songent à le faire autrement, en innovant.

Alors, tirez les premiers, messieurs du Québec Inc.! Nous en ferons un motif de plus de rallier nos rangs auprès d’une population qui hésitera de moins en moins à passer à l’action avec nous.

Mots-clés : Opinion Québec
Guy Roy

l’auteur est membre du collectif PCQ de Québec solidaire à Lévis.

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