Édition du 23 avril 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Élections fédérales 2011

Un grand absent au débat des chefs

Le débat télévisé au coeur d’une campagne électorale, devrait être le moment pour les partis politiques de faire connaître leur position sur les enjeux sociaux les plus importants.

Pourtant, ce fut le silence total sur un enjeu crucial qui va affecter et pour longtemps la vie de chaque canadien-ne et québecois-e. Même le NPD n’en a pas parlé.

Silence assourdissant également tout au long de cette campagne, - du moins à ma connaissance - sauf un article de Louis-Gilles Francoeur dans Le Devoir du 12 avril.

Même parmi les progressistes, certains ne semblent pas avoir pris la pleine mesure de l’étendue et de la gravité de cette menace qui se rapproche de plus en plus. Lors de la manifestation du 12 mars, je n’ai pas vu une seule pancarte portant sur cet enjeu spécifique, qui pourtant sous-tend tous les autres : augmentation des frais de scolarité, augmentation des tarifs d’Hydro, baisses d’impôt pour les grandes entreprises, coupures dans les services publics (incluant ceux offerts aux personnes âgées) pour mieux préparer le terrain au privé, dominance des énergies du passé (gaz de schiste, pétrole), menaces à la souveraineté alimentaire, (dont la gestion de l’offre) et à l’agroécologie, invasion des OGM, risque plus imminent de la privatisation de l’eau, PPP, etc. Il fera aussi de nombreuses victimes dans les rangs des petites entreprises. Son nom le dit, aucun secteur, aucune région, aucune personne, aucun palier de gouvernance incluant le pouvoir des municipalités ne va y échapper.

Pas certaine que beaucoup font le lien entre leurs revendications et le nom de cet absent. Les très rares fois qu’il est nommé c’est pour le présenter comme créateur d’emplois, source de fabuleuses retombées économiques au Québec et au Canada.

Ce grand absent au débat des chefs, c’est le chouchou du néolibéralisme. C’est le moyen par excellence trouvé par l’oligarchie pour bâillonner la démocratie. Mine de rien. A l’insu de tous. Voilà longtemps qu’ils se sont organisés, - dès 1947 en créant la Société du Mont-Pèlerin - afin de trouver une façon ingénieuse de contrôler les gouvernements, de telle sorte qu’aucun d’entre eux ne puisse jamais plus se raviser de faire un New Deal à la Roosevelt. Revanche totale et réussie. Et ce sans éveiller les soupçons des populations.

Il existe depuis quelques décennies déjà, mais dans sa nouvelle forme, il sera plus puissant, plus tranchant, plus écrasant. Plus rien, ni personne ne doit lui résister.

Bien sûr, comme d’autres, j’ai proposé qu’il fasse irruption au débat des chefs. Je savais bien qu’on ne lui ferait pas place. Moins on en parle mieux c’est. Il touche de si près les intérêts de l’oligarchie. Les citoyens pourraient finir par s’en rendre compte.

Lorsque confrontés et démasqués, ils répondent en le banalisant, en le présentant de façon la plus anodine possible : « Après tout, de simples règles commerciales, il en faut bien dans nos sociétés. On ne peut plus vivre renfermé sur soi, il faut être ouvert au monde... »

Ce grand absent au débat des chefs, je suppose que vous l’avez reconnu : c’est l’Accord économique et commercial global (AÉCG) Canada-Union européenne.

Sa nouvelle forme n’est pas encore complètement finalisée, mais c’est pour bientôt. On est rendu aux dernières rondes. Les négociations achèvent. Ce n’est pas encore conclu. Tout n’est pas encore perdu. Espoir. Mince, mais espoir tout de même. C’est encore temps de les arrêter avant que tout ce qui nous est cher soit détruit par ces puissants et pour leurs seuls intérêts.

En 2001, il y avait eu un grand réveil devant la menace de la ZLEA, réveil couronné de succès. Pourquoi on ne pourrait être aussi efficace aujourd’hui ?

Quand nos gouvernements auront capitulé une fois de plus en signant cet accord concocté par l’oligarchie, ce sera encore plus difficile de libérer la démocratie.

Pour en savoir davantage :

http://www.ledevoir.com/politique/canada/320929/traite-de-libre-echange-canada-europe-les-negociations-sans-debat-un-outrage-au-parlement

http://www.quebec.attac.org/rubrique-56.php3

http://www.quebec.attac.org/IMG/pdf/CETA_comic_FR.pdf

http://www.youtube.com/watch?v=XhgaP3a4CqU&feature=player_embedded

http://canadians.org/francais/commerce/documents/rapport-aecg-eau-1210.pdf

http://www.canadians.org/francais/commerce/documents/AECG_mauvaise_QC_CA.pdf

Françoise Breault

Après une carrière en enseignement, dont un an avec les Échanges France-Québec, j’ai poursuivi en travail social auprès des familles. Vers l’âge de cinq ans, je me demandais pourquoi il y avait des pauvres et ce que je pouvais faire. Sans en prendre pleinement conscience, cette interrogation m’a habité toute ma vie. Une année en Amérique du Sud ne m’avait toujours pas apporté de réponse. Cela m’a pris du temps à voir clair... Maintenant que la lumière est allumée, je ne peux et ne veux la refermer... Tous les faits, toutes mes lectures me confirment comment le système économique actuel contribue à ce fossé grandissant entre riches et pauvres. Me voici maintenant à ma 3e carrière, celle où je peux mettre tout mon temps et énergie à sensibiliser les gens aux graves enjeux d’aujourd’hui, afin de vivre dans un monde plus juste... « mais nous, nous serons morts mon frère... ».

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