18 septembre 2025 / DE : Paul Kahnert
Traduction Johan Wallengren
Tiré de Rabble
Cette position pro-nucléaire du NPD ne lui rapportera aucun vote et lui coûtera en fait la prochaine élection, en plus de le priver d’un grand nombre de votes dans les années à venir.
C’est un prix très élevé à payer pour apaiser les lobbyistes du nucléaire, ainsi que les autres parties intéressées, qui ne voteront jamais pour le NPD de toute façon.
Les délégués au congrès du NPD de l’Ontario seraient bien avisés, le week-end du 20 septembre, de voter en faveur de l’abandon de cette politique.
Cette lettre ouverte se veut une tentative d’empêcher le NPD de l’Ontario de commettre une erreur épouvantable.
En juin 2002, une personne au fait des affaires internes du NPD est venue à notre réunion de l’Ontario Electricity Coalition et nous a avertis du projet imminent du NPD de privatiser l’ensemble de la nouvelle production d’électricité. Il a été expliqué au chef Howard Hampton pourquoi il s’agissait d’une très grave erreur, et celui-ci s’est présenté au congrès avec une motion invitant à y renoncer. À l’issue du vote, le projet a été abandonné.
Détaillons pourquoi le projet du NPD prônant l’énergie nucléaire en tant que source d’énergie propre, verte et abordable constitue une erreur épouvantable.
La question de l’hydroélectricité est complexe et fait appel à des connaissances techniques, politiques et historiques. Or, il n’y a personne au NPD de l’Ontario qui possède une telle combinaison de connaissances.
Ayant travaillé dans le secteur de l’hydroélectricité pendant 33 ans, je connais très bien le système hydroélectrique. J’ai en outre mené les campagnes provinciales de 2002, 2003 et 2007 et ai débattu en face à face avec les ministres de l’Énergie. Je peux vous dire que la question de l’énergie nucléaire a été recentrée sur la privatisation et la maximisation des profits. Le premier ministre Doug Ford a plusieurs fois décrit l’énergie nucléaire comme étant « propre et abordable ». C’est comme dire que les lasagnes et les gâteaux au fromage sont des aliments amaigrissants.
Le plan nucléaire de Ford est largement axé sur le financement par partenariat public-privé (PPP) de nouvelles centrales nucléaires et s’intéresse particulièrement aux petits réacteurs modulaires (PRM), qui restent à un stade très expérimental et n’ont pas fait leurs preuves. Le financement par PPP est la forme la plus insidieuse de privatisation.
Les investisseurs qui s’engagent dans des PPP s’attendent à un retour sur investissement conséquent. Il n’y a pas d’argent gratuit. Nous devons nous souvenir qu’Ontario Hydro ancienne formule a accumulé 34 milliards de dollars de dette presque entièrement liée au nucléaire, ce qui montre clairement à quel point la construction et l’entretien des centrales nucléaires coûtent cher. Ajouter une rémunération pour les investisseurs ne fera que rendre l’énergie nucléaire ridiculement chère.
L’extraction et la production de combustible nucléaire sont des activités très polluantes et émettrices de carbone. Les investisseurs privés ne parlent jamais du problème des déchets. L’énergie nucléaire est inefficace : on en perd une grande partie sous forme de chaleur non récupérée et de déperdition dans le transport. Une grande question se pose alors : comment fera-t-on pour économiser de l’énergie ? On n’est pas près de voir les investisseurs privés réclamer des économies d’énergie. Prendre des mesures pour véritablement réduire la consommation d’énergie implique une diminution de la demande et des profits.
Les politiciens de tous bords n’ont pas la moindre idée de l’ampleur des coûts en jeu lorsqu’il s’agit de se tourner vers un système énergétique vert basé sur les énergies renouvelables. Si tous les conducteurs de l’Ontario branchaient leur véhicule électrique après le travail, au moment même où la demande culmine déjà, on assisterait à une saturation du système assez redoutable.
La construction des infrastructures nécessaires exigera des investissements massifs dans la production, le transport et surtout la distribution, sans compter l’installation de stations de recharge et de bornes de recharge à domicile.
Nombre de pays ont reconnu le fait que la transition vers les énergies renouvelables et une économie moins énergivore est définitivement incompatible avec un système de maximisation des profits et ont par conséquent créé des entreprises publiques destinées à produire de l’énergie verte. L’Australie, notamment, est un pays qui s’est engagé sur cette voie. En Europe, neuf des dix pays à la pointe de la transition énergétique vers les énergies renouvelables ont un point commun : le processus y a été piloté par une entreprise publique œuvrant dans l’énergie renouvelable. Le NPD de l’Ontario devrait regarder cela de près, car c’est en fait la voie de l’avenir.
La loi sur l’énergie propre des libéraux a en substance donné carte blanche aux producteurs privés d’énergie verte pour imprimer de l’argent. En août dernier, Ford a annoncé la plus grande expansion du secteur privé de l’énergie de l’histoire de l’Ontario. En effet, il a promis exactement la même chose que le premier ministre conservateur Mike Harris du temps où ce dernier procédait à la déréglementation de l’hydroélectricité, dans les années 1990, puisque Ford a à son tour fait miroiter une baisse des tarifs. Lorsqu’il a annoncé la nouvelle, il a utilisé neuf fois le mot « abordable » et a promis une baisse des coûts, des économies pour les consommateurs et des prix compétitifs. Voici ce qu’il est advenu de la promesse de baisse des tarifs de Harris : en 2007, les tarifs avaient doublé ! En 2010, ils avaient triplé et en 2018, ils avaient quadruplé.
Selon le Bureau provincial de la responsabilité financière, Ford dépense jusqu’à 7 milliards de dollars par an pour dissimuler et protéger le programme de déréglementation du marché de l’électricité de Mike Harris. Actuellement, Ford se porte garant des profits et refile la facture aux contribuables. L’expansion record des activités à but lucratif du secteur privé dans l’énergie nucléaire voulue par Ford fera grimper les tarifs et sera très coûteuse pour les particuliers comme pour les entreprises. Ford va-t-il lui aussi utiliser les deniers publics pour subventionner les hausses de tarifs ? Prendre en marche le train du nucléaire en le présentant comme une énergie propre, verte et abordable est une erreur épouvantable. C’est plutôt le moment de mettre le holà et de dénoncer le projet de Ford. Le NPD de l’Ontario a déjà eu pour politique de laisser le secteur public gérer l’énergie. Il est temps de renouer avec le secteur public, de même qu’avec une énergie effectivement propre, verte, et un tarif « au prix coûtant pour la population ».
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