
La simplicité volontaire, plus que jamais...
Serge Mongeau
Serge Mongeau, le père de la simplicité volontaire, nous a quittés à l’âge de 88 ans, il y a une dizaine de jours. Militant écologiste, éditeur et auteur, médecin, il aura grandement influencé de nombreux lecteurs de ma génération et permis la création de mouvements comme le Réseau québécois de la simplicité volontaire, le Mouvement québécois pour une décroissance conviviale et le réseau Transition Québec. Je garde un bon souvenir de notre rencontre, il y a plusieurs années, lors d’un salon du livre. Publié à plusieurs reprises depuis 1985, son ouvrage le plus connu, « La simplicité volontaire », nous fait réfléchir sur notre rapport à la consommation et notre pouvoir d’organiser notre vie d’une façon différente. L’auteur y questionne la société de consommation, mais aussi notre état d’aliénation devant ces nombreuses sollicitations pour toujours posséder davantage. Un très bon bouquin de référence à lire et à relire.
Extrait :
Jamais l’humanité n’a disposé d’autant de richesses, jamais elle n’a possédé de techniques aussi efficaces et puissantes, jamais elle n’a maîtrisé un tel savoir, et pourtant jamais au cours de l’Histoire autant d’êtres humains n’ont été privés de l’essentiel, jamais non plus n’a-t-on prévu dans un avenir si proche autant de changements catastrophiques de l’équilibre naturel, changements dus à l’activité humaine. Les appels à l’action fusent de toutes parts, pour la justice sociale, pour la solidarité, pour le respect de la nature, mais rien n’y fait : ce sont les entreprises multinationales qui contrôlent le monde et, avec la complicité des gouvernements qui se soumettent à leurs desiderata, établissent les priorités nationales et internationales, lesquelles se résument à « profits », « compétitivité » et « libre-échange ».

Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes
Jean-Jacques Rousseau
J’ai été heureux de réaliser récemment que l’on enseignait encore au cégep le « Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes » de Jean-Jacques Rousseau. C’est, avec le « Contrat social », l’un des principaux ouvrages du grand écrivain et philosophe du XVIIIe siècle. Rousseau y développe sa conception de l’état de nature, qui précède l’État, et de la perfectibilité humaine. Précurseur de la pensée progressiste, il y décrit la propriété privée, dans son sens exact, comme la source de toutes les inégalités. Une œuvre fondamentale !
Extrait :
Voilà donc toutes nos facultés développées, la mémoire et l’imagination en jeu, l’amour-propre intéressé, la raison rendue active et l’esprit arrivé presque au terme de la perfection, dont il est susceptible. Voilà toutes les qualités naturelles mises en action, le rang et le sort de chaque homme établi, non seulement sur la quantité des biens et le pouvoir de servir ou de nuire, mais sur l’esprit, la beauté, la force ou l’adresse, sur le mérite ou les talents, et ces qualités étant les seules qui pouvaient attirer de la considération, il fallut bientôt les avoir ou les affecter, il fallut pour son avantage se montrer autre que ce qu’on était en effet. Être et paraître devinrent deux choses tout à fait différentes, et de cette distinction sortirent le faste imposant, la ruse trompeuse, et tous les vices qui en sont le cortège. D’un autre côté, de libre et indépendant qu’était auparavant l’homme, le voilà par une multitude de nouveaux besoins assujetti, pour ainsi dire, à toute la nature, et surtout à ses semblables dont il devient l’esclave en un sens, même en devenant leur maître ; riche, il a besoin de leurs services ; pauvre, il a besoin de leur secours, et la médiocrité ne le met point en état de se passer d’eux. Il faut donc qu’il cherche sans cesse à les intéresser à son sort, et à leur faire trouver, en effet ou en apparence, leur profit à travailler pour le sien : ce qui le rend fourbe et artificieux avec les uns, impérieux et dur avec les autres, et le met dans la nécessité d’abuser tous ceux dont il a besoin, quand il ne peut s’en faire craindre, et qu’il ne trouve pas son intérêt à les servir utilement. Enfin l’ambition dévorante, l’ardeur d’élever sa fortune relative, moins par un véritable besoin que pour se mettre au-dessus des autres, inspire à tous les hommes un noir penchant à se nuire mutuellement, une jalousie secrète d’autant plus dangereuse que, pour faire son coup plus en sûreté, elle prend souvent le masque de la bienveillance ; en un mot, concurrence et rivalité d’une part, de l’autre opposition d’intérêt, et toujours le désir caché de faire son profit aux dépens d’autrui, tous ces maux sont le premier effet de la propriété et le cortège inséparable de l’inégalité naissante.

La Petite Fadette
George Sand
George Sand, de son vrai nom Amantine Aurore Lucile Dupin, compte parmi les écrivains les plus prolifiques. On lui doit plus de 70 romans, des nouvelles, des contes, des pièces de théâtre et des écrits politiques. Elle fut une femme libre, prenant la part des femmes, prônant la passion, fustigeant le mariage et luttant contre les préjugés de la société conservatrice de son temps. « La Petite Fadette » est l’un de ses romans champêtres qui s’intéresse aux monde paysan. La Petite Fadette, Fanchon Fadet, fille laide que l’on surnomme aussi le Grelet, est la petite-fille d’une sorcière de village. On lui donne mauvaise réputation en raison des pouvoirs de sourcière qu’on lui attribue elle aussi. Mais lentement, sûrement, dans une longue et belle ascension, elle deviendra la jeune femme dont les jumeaux Landry et Sylvinet s’éprendront. Vraiment, un très beau roman, comme probablement tous les romans de George Sand.
Extrait :
Eh bien, Fanchon Fadet, puisque tu parles si raisonnablement, et que, pour la première fois de ta vie, je te vois douce et traitable, je vas te dire pourquoi on ne te respecte pas comme une fille de seize ans devrait pouvoir l’exiger. C’est que tu n’as rien d’une fille et tout d’un garçon, dans ton air et dans tes manières ; c’est que tu ne prend pas soin de ta personne. Pour commencer, tu n’as point l’air propre et soigneux, et tu te fais paraître laide par ton habillement et ton langage. Tu sais bien que les enfants t’appellent d’un nom encore plus déplaisant que celui de grelet. Ils t’appellent souvent le màlot. Eh bien, crois-tu que ce soit à propos, à seize ans, de ne point ressembler encore à une fille ? Tu montes sur les arbres comme un vrai chat-écurieux, et quand tu sautes sur une jument, sans bride ni selle, tu la fais galoper comme si le diable était dessus. C’est bon d’être forte et leste ; c’est aussi bon de n’avoir peur de rien, et c’est un avantage de nature pour un homme. Mais pour une femme trop est trop, et tu as l’air de vouloir te faire remarquer. Aussi on te remarque, on te taquine, on crie après toi comme après un loup. Tu as de l’esprit et tu réponds des malices qui font rire ceux à qui elles ne s’adressent point. C’est encore bon d’avoir plus d’esprit que les autres ; mais à force de le montrer, on se fait des ennemis. Tu es curieuse, et quand tu as surpris les secrets des autres, tu les leurs jettes à la figure bien durement, aussitôt que tu as à te plaindre d’eux. Cela te fais craindre, et on déteste ceux qu’on craint. On leur rend plus de mal qu’ils n’en font. Enfin, que tu sois sorcière ou non, je veux croire que tu as des connaissances, mais j’espère que tu ne t’es pas donnée aux mauvais esprits ; tu cherches à le paraître pour effrayer ceux qui te fâchent, et c’est toujours un assez vilain renom que tu te donnes là. Voilà tous tes torts, Fanchon Fadet, et c’est à cause de ces torts-là que les gens en ont avec toi. Rumine un peu la chose, et tu verras que si tu voulais être un peu plus comme les autres, on te saurait plus de gré de ce que tu as de plus qu’eux dans ton entendement.
Robespierre - La fabrication d’un monstre
Jean-Clément Martin
C’est bien évidemment la première biographie que je lisais de Maximilien de Robespierre, qui devait plus tard lui-même se renommer Maximilien Robespierre, l’un des principaux et des plus controversés acteurs de la Révolution française. Le livre est décidément très instructif et réussit bien, comme le veut l’auteur, à remettre les choses en perspective quant au rôle de Robespierre au cours des années 1789-1994, mais le texte est tellement dense, détaillé et chronologique plutôt qu’explicatif, qu’on à parfois de la peine à suivre l’auteur. Mais « Robespierre – La fabrication d’un monstre » est tous compte fait une biographie honnête et éclairante qui contribue à nous prémunir contre les jugements faciles.
Extrait :
Comment un jeune notable est-il devenu l’élu des savetiers ? Reconnaissons que rien ne prédisposait Robespierre à cette évolution. Alors qu’il jouissait d’une position sociale reconnue dans sa ville, il rompt avec son milieu, ou tout au moins ses grandes figures. C’est ce passage complexe qu’il faut expliquer, sans rester en tête à tête avec Maximilien, puisqu’il partage un itinéraire avec beaucoup d’autres de ses semblables, jeunes avocats talentueux, ambitieux et mécontents de leur sort.
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