Pourtant, tous ces gens dont on abuse, qu’on criminalise, qu’on traite comme on fait les compte en utilisant des chiffres farfelus, qu’on accuse de mettre en péril « la nation », qu’on déshumanise, qu’on exploite, qu’on prive de leur dignité, qu’on rend corvéables à merci, tous ces gens ont le dos large et encore plus lorsqu’ils n’ont pas des droits équivalents aux autres, en particulier l’ultime, le droit de vote, ce qui les garde en plus dans l’incapacité de protester, de se rebeller. Malheureusement pour elleux, le droit de vote est bel et bien le nerf de la guerre. Nous parlons ici bien sûr des personnes immigrantes mais de façon plus spécifique, nous parlerons des travailleurs et travailleuses immigrantes temporaires, qui représentent le plus gros contingent, et de loin, de la population immigrante au Québec. Assorti-es d’une date d’expiration de par leur statut, les membres de ce contigent se voient obligé-es de vivre dans une situation de précarité prolongée, souvent sous la coupe d’un seul employeur (ce qui les rend extrêmement vulnérables aux abus). La raison de la préférence accordée à cette catégorie d’immigrant-es, tant par le fédéral que par le provincial, est qu’elle est arrimée essentiellement aux « besoins » des entreprises depuis son extension en 2006 sous le gouvernement Harper.
Selon François Crépeau, professeur de droit international public et ancien rapporteur spécial des Nations-Unies pour les droits des migrants, cité dans [1], « Toutes les sociétés sont capables d’absorber une immigration, sans avoir besoin de la chiffrer ou de la quantifier. Le chiffre, c’est la composante d’un discours politique absolument populiste, qui se donne des allures de science mais qui contribue surtout à diviser, à distordre la réalité. »
À ce chapitre, la CAQ comme le PQ se livrent actuellement une lutte sans merci qui prend les airs d’un concours de qui mystifiera le plus la population pour démontrer son nationalisme, qu’ils semblent considérer tous les deux comme la valeur numéro un de leurs chartes personnelles. Avec des démonstrations bidon et extrêmement tendancieuses, ils essaient de nous expliquer en quoi les immigrant-es sont responsables de la crise du logement. François Legault sortira de son chapeau des données qu’il associera entre elles, en bon prestidigitateur, pour nous convaincre que 100 % des immigrant-es temporaires sont responsables du problème de logement, qu’iels sont aussi responsables du tiers de la pénurie de personnel en santé et de la moitié du manque de personnel qualifié en enseignement. Talam ! Rien de moins. De son côté, Paul St-Pierre Plamondon, tout aussi odieusement et graphiques à l’appui, nous expliquera que l’immigration est non seulement responsable de la crise du logement mais également de la baisse de la natalité au Québec, ce qui est bien évidemment faux, comme nous l’explique l’IRIS dans un texte de Philippe Hurteau publié le 31 octobre [2].
Nous avons au Québec un système d’immigration à plusieurs vitesses. Après avoir brandi la possibilité de faire déménager dans d’autres coins du Canada 80 000 personnes réfugiées, Legault s’est rétracté. (Il faut dire qu’il n’affiche pas une excellente compréhension de ce que veut dire droit humain, lui qui a déjà nié subtilement que le droit à un logement constitue un droit fondamental.) Il a fini par jeter son dévolu sur d’autres catégories d’immigrant-es, comprenant peut-être qu’en ces temps de guerres et de catastrophes climatiques, il n’est pas bien vu d’enfoncer la tête de la personne qui se noie. Il s’est donc contenté de planifier le gel des catégories correspondant aux demandeurs et demandeuses d’asile et de la recomposition familiale. PSPP planifie aussi de geler la catégorie des demandeurs et demandeuses d’asile mais souhaite réduire de moitié la catégorie de la recomposition familiale.
S’il a été question de réduire l’accueil et la présence de travailleurs et de travailleuses temporaires, le Patronat s’est empressé de convoquer les médias, [3] et de signifier qu’il avait besoin d’un révision à la hausse du seuil maximal d’effectifs étrangers pour les postes à bas salaire (pour passer de 10 à 20%), faute de quoi, malheureusement, « on ne pourrait plus garder nos entreprises en sol canadien ». C’est un argument auquel la CAQ est extrêmement sensible, elle dont le Conseil des Ministres en 2022 était composé à 29% de représentant-es du milieu des affaires, du jamais vu depuis le milieu du 20e siècle, toujours selon l’IRIS.
Ce modèle d’immigration et ces discours liberticides ont assez duré. Il faut leur opposer une résistance radicale parce que c’est toute notre humanité et la valeur qu’on s’accorde les un-es aux autres qui s’y voit dépréciée.
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